Témoignages. "Je n'ai jamais reçu autant de soutien", cinq interventions marquantes des marins-pompiers de Marseille en 2023

Publié le Mis à jour le Écrit par Bérénice Rolland

En ce début d'année 2024, c'est l'occasion des bilans. Les marins-pompiers de Marseille ont comptabilisé 122 000 interventions en 2023. Pour France 3 Provence-Alpes, ils sont revenus sur certaines qui les ont particulièrement marqués.

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122 000 opérations en 2023, c'est le bilan des interventions des marins-pompiers de Marseille. Les secouristes l'ont annoncé sur X (anciennement Twitter), le lundi 1ᵉʳ janvier, au premier jour de l'année 2024.

Des histoires à raconter, il y en a... Les opérations des marins-pompiers rythment la vie de la cité phocéenne. France 3 Provence-Alpes a rencontré ces soldats du feu. Récit de cinq interventions qui les ont marqués.

La plus touchante : "C'était une fierté quand on nous a annoncé que l'enfant était viable"

Charlie est second maître au bataillon des marins-pompiers de Marseille. Et cette année, il a aidé à mettre au monde un bébé. C'était le 27 novembre dernier dans le 10e arrondissement de Marseille et cette histoire marquera sûrement longtemps sa carrière professionnelle.

Ils sont appelés pour aider une femme enceinte. Sur place, l'équipe, composée de trois secouristes, se rend compte que cette femme est en train d'accoucher.

"J'ai appelé un médecin pour extraire le fœtus", témoigne Charlie. Le futur nouveau-né sortait par voie basse, en position siège. Un danger pour sa vie, l'enfant devant sortir la tête en bas. Lorsque le bébé est extrait, il est en arrêt cardiorespiratoire. Tout s'enchaîne très vite pour les sauveteurs. Une ambulance réanimation arrive au bout de 20 minutes. "Le bébé reprend son pouls et son activité cardiaque, nous confie-t-il avec soulagement. C'était une fierté quand on nous a annoncé que l'enfant était viable."

La maman et le nouveau-né sont ensuite pris en charge à l'hôpital de la Conception, dans le 5e arrondissement de Marseille. "Quand je suis rentré chez moi, c'était un ouf de soulagement."

Une histoire toute particulière pour lui... "À ce moment-là, ça faisait trois mois que je venais d'être papa, se souvient le marin-pompier. J'ai rapidement pris des nouvelles de ma femme et de mon enfant."

Aujourd'hui, la maman et son nouveau-né vont bien. Charlie sait que c'est aussi par ses actions que l'enfant a pu être sauvé.

La plus spectaculaire : "J'ai été impressionné par la violence du choc"

Le 9 septembre, vers 17 h, un bateau est percuté par une navette arrivant à toute vitesse au large des Goudes, dans le 8e arrondissement de Marseille. Fabien est commandant des opérations de secours pour cette intervention, il reste marqué par cet accident.

À 500 mètres de la terre ferme, au détour du cap Croisette un navire de plongeurs est amarré. 21 personnes sont à bord, elles s'occupent de compter le nombre de mérous, une espèce de poisson emblématique en Méditerranée. Une vedette arrive à vive allure. Elle réussit à contourner deux bateaux, eux aussi à l'arrêt, mais pas le troisième. "Elle est passée par-dessus le bateau en bois", se rappelle Fabien.

Tout s'est passé ensuite très vite... Les 21 personnes se sont retrouvées à la mer. 13 blessés graves, dont une très grave. "Elle avait mal au thorax, à ses membres inférieurs. Elle avait un traumatisme crânien. Elle avait du mal à se maintenir à flot", ajoute-t-il.

Au total, 71 marins-pompiers et 27 engins sont mobilisés. L'hélicoptère de la sécurité civile de Marignane est même envoyé pour porter assistance aux blessés les plus graves. Les autres victimes sont prises en charge sur la terre ferme.

"C'est la collision nautique la plus grave à laquelle j'ai pu faire face, nous confie Fabien. J'ai été impressionné par la violence du choc. Par les blessures des personnes qui étaient profondes aussi, même si c'est notre quotidien."

"En rentrant chez nous, on a vraiment eu le sentiment du devoir accompli", conclut le responsable des opérations.

Celle qui a mobilisé le plus de monde : "Je n'ai jamais reçu autant de soutien dans sa diversité"

L'effondrement de la rue de Tivoli restera l'intervention qui aura mobilisé le plus de secouristes en 2023. Dans la nuit du dimanche 9 avril, un immeuble, le 17 rue de Tivoli, dans le 5e arrondissement de Marseille, s'effondre. Le bilan est lourd, huit personnes meurent dans les décombres. Les moyens engagés sont importants, voire considérables. 

508 personnels du bataillon des marins-pompiers de Marseille interviennent sur place, mobilisant au total 98 engins. Chaque jour, une centaine de secouristes étaient mobilisés chaque jour jusqu'au 12 avril. "Il y a autant de pompiers mobilisés pour la plupart des gros feux de forêt. Sauf que l'espace est étendue, et là, le lieu est restreint", précise Laurent, un des commandants des opérations de secours.

C'est le premier à être arrivé sur les lieux. Et même si la situation est urgente, il faut savoir garder son sang-froid. "Il faut réagir de manière posée et rapide face à la situation", nous confie-t-il.

"Il faut dans un premier temps comprendre l'ampleur du sinistre, savoir ce qu'il s'est passé", ajoute le secouriste. Un cadre de sécurité doit également être établi pour éviter à tout prix des risques supplémentaires aux marins-pompiers.

Laurent est intervenu quatre fois sur les lieux. Et même s'il n'était pas toujours présent sur les lieux, "difficile de décrocher et de se reposer" une fois rentré à la maison. Il a tenu à clôturer l'intervention, ressentant un "sentiment d'investissement" très fort.

Des mois après cette catastrophe, il y pense encore. Il se rappelle des appartements vides avec tous les effets personnels de ces familles, venant tout juste de quitter les lieux. Des moments de vie brisés en quelques instants par les braises.

Le marin-pompier se souvient aussi avec peine de la rencontre avec les familles des disparus."Il faut trouver les mots justes pour leur annoncer. Il n'y a aucune formation pour cela. Ce sont des moments riches en émotions, même si on ne le laisse pas paraître. Il faut rester professionnel face aux familles."

Mais il gardera surtout, pour toujours en tête, "le soutien des Marseillais". Les attentions sont nombreuses à l'égard des marins-pompiers : des banderoles, des sourires, des regards, et même de petits gâteaux distribués. "Je n'ai jamais reçu autant de soutien dans sa diversité. C'est agréable, ça nous redonne le sourire et de l'énergie", nous confie-t-il avec émotion.

La plus périlleuse : "Ça aurait très bien pu mal terminer"

Le 2 mars, vers 12 h, à la calanque de l'Oule, dans le Parc national des Calanques, une jeune femme tombe au sol et se blesse au bras, alors qu'elle faisait de l'escalade. L'endroit est isolé et difficile d'accès, la roche est instable.

Des marins-pompiers spécialisés dans les secours en milieu périlleux et montagne sont appelés pour intervenir. Christian, premier-maître, fait partie de l'équipe. Avec l'intervention d'un hélicoptère, une civière, brancard permettant de transporter les blessés, est envoyée pour aider la victime. "À ce moment-là, la roche est très friable. Il y a beaucoup de vibrations avec le souffle de l'hélicoptère", se souvient-il.

Le danger en appelant un autre... "Un parpaing de la paroi est tombé à une dizaine de mètres de mon coéquipier", lance Christian, se rappelant encore sa frayeur. 

Aucun risque zéro pour l'équipe de secouristes. "Dans les Calanques, on n'est jamais à l'abri, c'est l'environnement qui dicte. Même si on ne prend aucun risque."

La victime et son collègue tirés d'affaire, c'est un soulagement pour Christian en rentrant chez lui. "Ça aurait très bien pu mal terminer", souffle le second-maître.

La plus mignonne : "Les animaux nous rendent tout de suite l'attention"

Le 29 décembre 2023, un chien tombe dans un puits abandonné d'une profondeur de 10 mètres. La scène s'est déroulée boulevard de la Pomme, dans le 11e arrondissement de Marseille, vers 8 h du matin. "L'herbe cachait le puits, le chien ne l'a pas vue", explique Benjamin, un des marins-pompiers qui a fait partie de cette opération de sauvetage.

À l'aide d'un harnais et d'une corde, le secouriste est descendu en rappel. Avant de pouvoir récupérer l'animal, Benjamin essaye d'appréhender le comportement de l'animal. Si celui-ci est agressif, il doit remonter pour s'équiper contre les morsures. "Le chien était apeuré, mais il n'était pas agressif. Il avait mal au bassin." Le marin-pompier a donc pu poursuivre le sauvetage. 

Tous deux remontés à la surface, le fidèle compagnon est remis à son propriétaire. "Ces moments-là sont gratifiants pour nous, confie Benjamin. Les animaux nous rendent tout de suite l'attention." Des caresses données et un crâne léché plus tard, le marin-pompier est rentré chez lui, sourire aux lèvres, avec le sentiment d'un travail bien accompli.

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