À l'occasion des 20 ans de la disparition de Bernard Loiseau, le chef emblématique de Saulieu (Côte-d'Or), son fidèle ami Guy Savoy lui rend un hommage vibrant et émouvant. "Le complice idéal", se remémore le chef étoilé parisien.
Il y a 20 ans, plus exactement le 24 février 2003, le célèbre chef cuisinier étoilé Bernard Loiseau disparaissait à Saulieu (Côte d'Or). Un choc pour les Français, notamment pour ses amis cuisiniers comme le grand chef parisien Guy Savoy. "C'est le complice idéal", se remémore-t-il ému. Car avant que Bernard Loiseau ne quitte ce monde, les deux hommes étaient plus que de simples confrères.
Les deux chefs se sont rencontrés en 1970 lorsqu'ils étaient en apprentissage chez les Frères Troisgros à Roanne. "Lui terminait son apprentissage, moi je commençais. Il était le premier apprenti et moi le dernier. On était en relation en permanence", raconte Guy Savoy à notre journaliste Elsa Bezin. Dans cette formation, les deux hommes vont nouer un véritable lien d'amitié qui ne va pas se briser, alors qu'ils vont emprunter des chemins différents.
Bernard Loiseau, le mentor et l'ami de Guy Savoy
Comme le rappelle Guy Savoy, Loiseau "a très vite sauté dans le grand bain". Car après l'obtention de son CAP de cuisine en 1971, Bernard Loiseau est engagé à La Barrière de Clichy à Paris par le chef Claude Berger. Ce dernier lui confiera la gérance du restaurant La Côte d'Or à Saulieu, qu'il vient de racheter en 1975 alors que Loiseau est âgé de 24 ans à peine.
"J'étais très admiratif de son itinéraire. Il avait deux années d'apprentissage de plus que moi, j'avais l'impression qu'il en avait dix, tellement il mettait de l'intensité dans ce qu'il faisait", détaille le chef originaire de Nevers.
Contrairement à Bernard Loiseau, Guy Savoy a fait plusieurs maisons avant de se jeter à l'eau. Il a perfectionné ses gammes notamment au restaurant étoilé le Lion d'Or, près de Genève en Suisse.
"Tu ne vas pas passer ta vie à vider des culs de poulet !"
Bernard Loiseau à son ami Guy Savoy
"Je me souviendrai toujours d’un jour, où je travaillais au Lion d'or. Bernard était venu faire une émission à la radio suisse romande. Et il dit à la journaliste qui l'accompagne : "ce midi j’aimerais bien qu’on aille déjeuner au Lion d’or parce que j’ai mon pote Savoy qui est là-bas". Il arrive en cuisine pendant que j’étais en train de brider des poulets... et là il me sort cette phrase qui pourrait tuer une personne solide. "Tu ne vas pas passer ta vie à vider des culs de poulets", raconte le sourire aux lèvres le chef étoilé. "Cette phrase résonne encore dans ma tête car il s’était mis déjà dans la tête que je lui succèderai à la barrière de Clichy, et il voulait absolument que je saute dans ce fameux grand bain".
Après cette histoire, Savoy continuera dans un dernier établissement trois étoiles, l'Oasis à La Napoule sur la Côte d'Azur, avant de succéder à Bernard Loiseau à La Barrière de Clichy en 1977. Destin lié pour ces deux cuisiniers dont l'amitié était très forte. Car 20 ans après le decès de Bernard Loiseau, Guy Savoy reste toujours ému à l'évocation de son acolyte : ils n'avaient pas besoin de se parler pour se comprendre.