"Moins d'idéologie, plus de pragmatisme" : Michel Barnier et Annie Genevard favorables à plus de tirs contre les loups

Quelques jours après la sortie tapageuse du président de la chambre d'agriculture de Haute-Saône, qui invitait les éleveurs à la désobéissance civile pour "taper le loup", le Premier ministre et la ministre de l'Agriculture se sont positionnés pour la hausse des tirs contre le canidé.

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Ces paroles ont résonné jusqu'au cœur de l'Élysée. Mercredi 2 octobre, L'Est républicain rendait public le contenu d'une lettre de Thierry Chalmin, président de la chambre d'agriculture de Haute-Saône, très critique concernant la gestion du loup sur son territoire. "J'enjoins les éleveurs à protéger vous-mêmes vos biens, à sortir armés et à taper un loup si vous en voyez un", écrivait-il à l'attention des agriculteurs du département. 

► À LIRE AUSSI : "Sortir armés" pour "taper un loup" : le président de la chambre d'agriculture de Haute-Saône incite à enfreindre la loi

Des propos offensifs, d'abord exprimés oralement lors d'une réunion à la Chambre d'agriculture le 20 septembre, qui encouragent ni plus ni moins à la désobéissance civile, le loup restant protégé par la convention de Berne. Contacté par France 3 Franche-Comté, Thierry Chalmin a confirmé sa sortie, provoquée selon lui par la mort d'une vache et de huit ovins après une attaque de loup mi-septembre.

Les paroles du président de la chambre d'agriculture haut-saônoise traduisent-elles, poussées à l'excès, une tendance gouvernementale penchant pour une hausse des tirs contre le canidé ? Quelques jours plus tard, deux personnages centraux du gouvernement se sont ainsi positionnés en ce sens. 

Le déclassement du loup, "signal positif" pour Annie Genevard

C'est d'abord Annie Genevard, nouvelle ministre de l'Agriculture issue du Doubs, qui s'est exprimée sur la question le 3 octobre, au sommet de l’élevage de Cournon (Puy-de-Dôme).

Dans son discours, l'ex-maire de Morteau est d'abord revenue sur la décision de l'Union européenne, qui le 25 septembre a adopté la proposition de la Commission européenne visant à abaisser le statut de protection du loup dans le cadre de la Convention de Berne. "C'est un signal positif que nous attendions tous" a-t-elle expliqué. 

C’est une bataille que j’ai menée avec acharnement comme présidente de l’ANEM [Association Nationale des Élus de la Montagne, NDLR] et dont je me réjouis aujourd’hui comme ministre. Comme quoi, il n’y a de batailles perdues que celles qu’on ne livre pas.

Annie Genevard,

ministre de l'Agriculture

Si la ministre a tenu à préciser que la lettre incendiaire de Thierry Chalmin, médiatisée la veille, n'était "pas du tout la bonne façon d'approcher le sujet", elle a tout de même assuré qu'elle comprenait "ce qui la motive".

Michel Barnier appuie la hausse "des prélèvements"

Son de cloche différent du côté de la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher. "Les appels à la destruction de cette espèce protégée sont irresponsables" a-t-elle déclaré. "Les auteurs d’actes en dehors du cadre légal s’exposent à de lourdes sanctions". 

Le retour du loup en France nécessite de trouver des solutions pour les éleveurs qui subissent des attaques et dont j’entends la détresse. La recherche de solutions durables de cohabitation est indispensable.

Agnès Pannier-Runacher,

ministre de la transition écologique

De quoi (un peu) rassurer les associations de protection de l'environnement ? Peut-être, mais le soulagement fut court. Quelques heures plus tard, c'est le Premier ministre lui-même qui a pris position sur ce sujet explosif, depuis le sommet de l’élevage de Cournon, en évoquant en premier lieu "les dégâts que fait le loup sur beaucoup d'exploitations, en cassant le moral des éleveurs".

Je pense que c'est un moment clé pour augmenter la capacité de prélèvement [de loups, NDLR].

Michel Barnier,

Premier ministre

Le chef du gouvernement s'est par ailleurs félicité du futur déclassement du loup par l'UE, en saluant le fait qu'il y avait "un mouvement sur cette question vers moins d'idéologie et plus de pragmatisme au niveau européen". 

"Ils ont abandonné l'idée de cohabiter. Ils préfèrent éliminer"

Des prises de paroles qui n'étonnent pas Patrice Raydelet, du Pôle Grands Prédateurs. "Je ne suis même pas en colère" réagit-il, "mais désabusé". "On a proposé des moyens de cohabiter, mais certains ont refusé de les entendre. Il n'y a pas la volonté de sortir de cette guéguerre entre éleveurs et loups. Ça ne sert plus à rien de faire des efforts".

Depuis plus de dix ans, les syndicats agricoles font pression sur les élus pour pouvoir tuer plus de loups. Eh bien ça y est, ça a marché.

Patrice Raydelet,

président du Pôle Grands Prédateurs

"C'est pour ça que certaines personnes n'hésitent pas à afficher leur discours violent envers le loup" continue-t-il. "Elles ne se cachent plus. Depuis quelques mois, le contexte leur est favorable. Les pouvoirs publics ont plié et, au fond, ont abandonné l'idée de cohabiter. Ils préfèrent éliminer".

Comptage de loups mi-décembre en France

Le signe annonciateur de cette tendance pour Patrice Raydelet ? En septembre 2023, avec le nouveau plan loup 2024-2029 où étaient abordées "l'étude du reclassement d’espèce de "strictement protégée" à "protégée" au niveau international et européen" et une "simplification des tirs", au grand dam des associations de protection de l'environnement.

► À LIRE AUSSI : "Il y a un excès de pouvoir" : plusieurs loups abattus, quatre associations attaquent le gouvernement devant le Conseil d'État

Résultat, dans certains départements comme le Doubs et la Haute-Saône, les préfectures n'ont pas hésité à délivrer des autorisations de tirs dans des zones touchées par des attaques du canidé. Nouvelle étape franchie le 25 septembre 2024, lorsque le Conseil de l’Union européenne a adopté la proposition de la Commission européenne visant à abaisser le statut de protection du loup dans le cadre de la Convention de Berne. 

Si pour l'instant, cette proposition n'est pas effective, les discussions sur le sujet devraient reprendre dans les prochains mois. Matignon a également annoncé ce 4 octobre que le Comité national du loup se réunirait mi-décembre pour "confirmer l'évaluation du nombre de loups dans le pays, voir les dégâts qui ont été faits" avec un"nombre d'abattages [qui, NDLR] dépendrait de l'évolution du nombre de loups".

Actuellement, toute personne tuant un loup (qui fait encore partie des espèces protégées) s'expose à une peine de trois ans d'emprisonnement et de 150.000 euros d'amende. Jusqu'à quand ?

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