Ce qu'il faut retenir de la visite d'Emmanuel Macron à Dole et Joux : étapes surprises, l'arrêté anti-manifestation retiré, casseroles etc...

Le président de la République s'est rendu dans le Doubs ce jeudi 27 avril, pour un hommage à Toussaint Louverture au Château de Joux près de Pontarlier. Il était attendu de pied ferme par les manifestants armés de casseroles. Arrêté de la préfecture retiré au dernier moment, halte surprise dans le Jura à Dole, tensions avec les manifestants, hommage... Ce qu'il faut retenir de cette journée.

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La configuration des lieux choisis par Emmanuel Macron pour sa visite dans le Doubs ne laissait guère de chances aux opposants de la réforme des retraites d'accueillir le président avec un concert de casseroles. Ce jeudi 27 avril, le chef d'Etat est venu commémorer le 175e anniversaire de l'abolition de l'esclavage en France au Château de Joux, près de Pontarlier (Doubs). Le déroulement de cette visite, dont le programme n'a pas entièrement été annoncé, n'a pas permis aux manifestants de s'approcher d'Emmanuel Macron. Retour sur une journée haute en rebondissements. 

Un arrêté préfectoral très strict... retiré au dernier moment

La préfecture du Doubs avait publié le mardi 25 avril dans la soirée un arrêté très strict interdisant tout rassemblement dans la commune de La Cluse-et-Mijoux, sur le territoire de laquelle se trouve le Château de Joux, ainsi que deux zones de protections à l'accès très restreint autour du Château et du Fort Mahler qui lui fait face. Les "dispositifs sonores portatifs" et "tout dispositif permettant de la diffusion de musique ou son amplifiée" étaient interdits, ainsi que tout "rassemblement festif à caractère musical". Interrogée, la préfecture avait cependant précisé que les casseroles n'étaient pas interdites par cet arrêté. 

L'arrêté préfectoral a rapidement été contesté par trois recours différents, notamment de la Ligue des droits de l'Homme, du Syndicat de la magistrature et de Force Ouvrière. Si, pendant un temps, il semblait que ce recours ne pourrait pas être examiné avant que la visite présidentielle n'ait débuté, finalement le tribunal administratif de Besançon devait rendre une ordonnance à 8h30 le jour de la visite. 

Ce jeudi 27 avril au matin, coup de théâtre : la préfecture du Doubs a publié très tôt dans la journée un arrêté qui retire l'arrêté anti-rassemblement du 25 avril. Selon les services de la préfecture, un changement de programme dans le déroulé explique ce revirement : alors que la cérémonie d'hommage qui devait se dérouler au Château de Joux était initialement prévue en extérieur, elle devait finalement avoir lieu dans l'enceinte de l'ancien fort, et en intérieur, et il n'y avait plus besoin de ces mesures. 

Deux jours plus tôt, le mardi 25 avril, le tribunal administratif d'Orléans a annulé un arrêté préfectoral similaire à celui de la préfecture du Doubs.

La tentative des manifestants pour atteindre le président de la République

En marge du déplacement du chef de l’Etat, le rendez-vous était donné à 10 heures au rond-point André Malraux de Pontarlier à l’appel de l’intersyndicale. Les manifestants ont commencé à investir les lieux, et très vite, la mobilisation a perturbé la circulation. Au cœur de l’action, Frédéric Vuillaume, secrétaire général de Force Ouvrière en Franche-Comté. Quelques heures plus tôt, ce dernier était en garde à vue avec le journaliste pigiste de Media 25 Toufik de Planoise pour répondre de faits d'entrave à la circulation des trains. Deux convocations qui interrogeaient à la veille de la visite présidentielle. Pour ce militant syndicaliste, venir aux côtés de ses camarades était une évidence : "C’est un droit fondamental de manifester, un droit constitutionnel. Si on ne manifeste pas, on ne revendique pas, il n’y a plus de démocratie."

Lorsque les gendarmes arrivent en nombre pour faciliter la circulation des voitures, bloquées au niveau du rond-point, Frédéric Vuillaume, quant à lui repart, porte-voix à la main, pour marcher jusqu’au Château de Joux. L’arrêté préfectoral interdisant les manifestations ayant été retiré, il était donc autorisé de se déplacer jusqu’à La Cluse-et-Mijoux. "Macron, Macron, les gueux sont dans la rue", "La retraite à 60 ans, on s’est battus pour la gagner, on se battra pour la garder", "On est là, on est là, même si Macron ne veut pas, nous on est là". Sur plus d’un kilomètre, les slogans sont scandés en pleine route par les manifestants ; les casseroles retentissent aussi. Certains ont même ramené une cloche. Peut-être par chauvinisme.

A moins de deux kilomètres du Château de Joux, les opposants à la réforme des retraites font face à une route bloquée. Une quarantaine de gendarmes, avec plusieurs camions, ont barré l’accès jusqu’à la bâtisse, nichée à plus de 950m d’altitude. Après plusieurs dizaines de minutes, près de 300 personnes se sont réunis au pied du Château de Joux. Et les casserolades reprennent.

Loin des casseroles, halte surprise au marché de Dole

Le secret a été précieusement gardé. Peu d'élus ont été prévenus. Peu de rédactions également. La plupart des journalistes se sont rendus à Besançon pour un transport en car jusqu'au Château de Joux... Après l'atterrissage de son avion à l'aéroport de Tavaux, Emmanuel Macron a pourtant fait un petit détour par le centre-ville de Dole, petite commune du Jura. 

Devant le marché couvert de Dole, encerclé par les forces de l'ordre, le président prend le temps de discuter avec certains  passants. Auto-entreprenariat, désert médicaux, salaires des grands patrons, Smic, sont brièvement abordés.

"Vous dites beaucoup de bêtises tous les jours". Fabrice Schlegel, lanceur du mouvement des gilets jaune dans le Jura, interpelle Emmanuel Macron. "Vous pouvez enfumer les Français, mais ça ne marche pas avec moi. On est encore quelques-uns éclairés".

Des militants de la CGT Jura qui tentent de rejoindre le marché sont bloqués par les forces de police. "Voilà, l'État de droit, c'est l'État de Macron à faire ce qu'il veut" dénonce Antoine Cordier, secrétaire général de la CGT Dole. 

Interrogé sur cet arrêt impromptu, le président de la République a expliqué :"C'est quand même plus simple. Il y a des gens pas contents, des gens qui vous engueulent, mais vous pouvez parler". Après trois quarts d'heure sur place, le président repart, direction le Haut-Doubs.

Casseroles et cloches en route vers le Château de Joux

L’annonce du bain de foule d’Emmanuel Macron à Dole a suffi à ce que les manifestants tentent de briser le cordon. Frédéric Vuillaume en tête lance aux gendarmes : « C’est illégal de nous bloquer, laissez-nous passer ! » Tous les manifestants reprennent en cœur. Les heurts commencent et les gaz lacrymogènes sont de sortie. Pendant plusieurs dizaines de minutes, les tensions montent, et le groupe devient confus. Chacun pousse de part et d’autre, mais le cordon reste bien en place.


A chaque nouvelle annonce, les manifestants se remobilisent. Comme lorsque le Président décolle de Dole. Mais au pied du Château de Joux, le retard du Président de la République reste grand, l’attente devient longue. Certains improvisent un pique-nique. D’autres continuent le concert de casseroles. L’entrain n’est plus aussi grand qu’au début de la matinée. La mobilisation s’essouffle peu après le début du discours du Président.

2h50 dans le Doubs pour un hommage à Toussaint Louverture

À un peu plus de 2km des manifestants, Emmanuel Macron atterrit dans la petite commune de La Cluse-et-Mijoux aux alentours de 12h40. Vingt minutes plus tard, le président rejoint les élus et journalistes qui l'attendent depuis le milieu de la matinée. Au loin, les klaxons de la manifestations résonnent.

Après une rapide visite des lieux, et un dépôt de gerbe, Emmanuel Macron entame un discours de 17 minutes, en hommage à Toussaint Louverture, figure de la lutte contre l'esclavage, gouverneur auto-proclamé de l'ancienne colonie française d'Haïti, emprisonné par Napoléon Bonaparte au Château de Joux, où il a fini ses jours le 7 avril 1803. 

Lire notre article "Mais pourquoi Toussaint Louverture, héros de la décolonisation, a-t-il été emprisonné au Château de Joux dans le Haut-Doubs ?"

Un choix d'hommage, qui n'est pas sans rappeler "l'itinérance mémorielle" que le président de la République avait entamé, à l'époque où le mouvement des gilets jaune commençait à ralentir. Dominique Voynet, ancienne ministre de l'Environnement sous Jospin, et secrétaire régionale d'EELV, a d'ailleurs ironisé dans un communiqué envoyé en début de semaine : "Il s’agit de célébrer le 220ᵉ anniversaire – un nombre dont on notera qu’il offre des nouvelles perspectives au président s’il veut ainsi occuper la fin de son mandat ! - de la mort de Toussaint Louverture". "À chaque fois qu’il est en difficulté, le président de la République joue du même ressort : il commémore, il inaugure, jamais avare de mots exaltés et de considérations morales à asséner" s'est agacée l'ancienne ministre.

Dans son discours d'hommage, donné dans une petite salle du Château de Joux où se sont serrés quelques dizaines de personnes, Emmanuel Macron vante les mérites de "l'ordre" au service de la "liberté". "Révolutionnaire d'exception, Toussaint Louverture considérait lui aussi que seul l'ordre pouvait maintenir la liberté, la prospérité et le bien public" déclare Emmanuel Macron. "L'ordre de la discipline et de la rigueur militaire pour brasser ensemble anciens esclaves natifs d'Afrique, brigadiers de couleur, officiers français au sein de son armée" s'exclame le chef d'État. 

Après une pause repas, puis un moment de "convivialité" avec des élus locaux, le convoi présidentiel redescend à La Cluse-et-Mijoux, pour une dernière séquence médiatique.

Signatures et photos avec les enfants de l'école primaire

Avant de remonter dans son hélicoptère, qui l'attend sur le terrain de football de la petite commune où il est arrivé moins de trois heures auparavant, le président de la République s'offre un deuxième bain de foule, garanti sans casseroles, dans l'école primaire de La Cluse-et-Mijoux.

Les enfants, impressionnés de rencontrer le président de la République, s'agglutinent autour du chef d'Etat : "On va passer à la télé !"

Comme lors de sa halte doloise, seule la caméra du "pool", mise à disposition de tous les médias, le suit. Les journalistes accrédités pour l'événement sont toujours 200 mètres plus haut, dans le Château de Joux.

Après une dizaine de minutes, le président quitte la nuée d'enfants, traverse la route, et repart en hélicoptère. En tout et pour tout, le président de la République aura passé 2h50 dans la commune isolée du Doubs, à l'abri des opposants à la réforme des retraites soigneusement tenus à distance.

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