Quels seront le(s) candidat(s) de la gauche aux éléctions régionales de juin prochain en Bourgogne Franche-Comté ? Le 21 février dernier, l'ensemble des forces de gauche se sont réunies pour parler d'un hypothétique rassemblement. Mais la réunion a surtout permis d'étaler les divisions.
C’est une réunion qui ferait rêver les nostalgiques de la gauche plurielle. Ce dimanche 21 février, de la France Insoumise (LFI) au Parti radical de gauche (PRG), des écologistes (EELV) aux socialistes (PS), des élus bourguignons et francs-comtois de toutes les sensibilités de gauche ont discuté ensemble. Et c’est déjà beaucoup !
A l’ordre du jour, les futures élections régionales des 13 et 20 juin prochains en Bourgogne Franche-Comté. Air du temps oblige, la réunion a eu lieu en visio. Mais à 4 mois des élections régionales, un tel rassemblement à gauche est à marquer d’une pierre blanche.
De quoi rassembler toute la gauche au scrutin de juin prochain ? Certainement pas à en croire les propos cinglants tenus à la sortie. C’est la France Insoumise qui, dans un communiqué publié ce 25 février, lance les hostilités. Les mots sont peu aimables. Le parti y dénonce « les ambiguïtés du clan Dufay », « la courtisanerie de Marie-Guite Dufay » avant d’estimer « sa candidature incompatible au rassemblement de la gauche et de l’écologie ». Le rassemblement est encore loin, mais ce n'est pas une surprise.
Trop proche des marcheurs
Alors pourquoi participer à une telle réunion ? Pour éviter la « politique de la chaise vide » répond Arnaud Guvenatam, représentant de la France Insoumise en Bourgogne. « Il y a des discussions où il y a tout le monde. On va défendre notre programme partout. La politique de la chaise vide, ce n’est pas ce que l’on a envie de montrer. » Pour l'instant, le parti de Jean-Luc Mélenchon n'a pas annoncé quelle forme prendra sa participation au prochain scrutin dans la région. Ce sera en tout cas sans la majorité sortante. Le mouvement pointe certaines mesures jugées trop libérales dans le bilan de la majorité comme l'ouverture à la concurence des TER. Il accuse surtout la majorité sortante et sa présidente d'être trop proches de la majorité présidentielle.
En 2017, Marie-Guite Dufay avait soutenu Emmanuel Macron dès le premier tour. Depuis, elle est à la tête d'une majorité qui réuni des partisans de la République en Marche jusqu'aux membres de Génération's, le parti de Benoit Hamon. Inacceptable selon la France Insoumise. Le communiqué cite plusieurs lieutenants de la présidente sortante qui, lors de la réunion commune, auraient refusé d’écarter toute alliance de deuxième tour avec des candidats favorables à Emmanuel Macron.
Une chance de rassemblement ?
Mais les participants à cette réunion imaginaient-ils vraiment un accord possible avec toute la gauche ? A cette question, Michel Neugnot, vice-président socialiste de la région répond d’abord par un silence. Mis en cause personnellement par La France Insoumise, il dit refuser de « négocier par voie de presse » et ajoute : « Quand on parle du rassemblement à gauche, on s’adresse à toute la gauche. Et après, on voit ceux qui veulent venir et ceux qui ne veulent pas. »
Y aura-t-il d’autres réunions aussi larges à gauche ? Le représentant du parti radical de gauche, Patrick Molinoz, lui aussi pointé du doigt, ne se fait guère d’illusions. « Le principe de l’union est de ne pas exclure. Mais pour parler, il faut être au moins deux. » Le maire de Venarey-les-laumes (Côte d’Or) se dit doublement surpris par le communiqué des Insoumis. « Sur le fond, LFI prétend appeler à l’union de la gauche mais pose comme premier principe l’exclusion de la présidente sortante (…) Sur la forme, chercher à faire le buzz en déformant des débats dont les conclusions ne sont pas arrêtées confirme la volonté de diviser plutôt que de rassembler. Dont acte. »
A peine plus optimiste, la représentante écologiste Claire Mallard veut se féliciter que ces échanges « sereins » et « francs » aient eu lieu. « Ce que je trouve intéressant, c’est le fait que l’ensemble des forces de gauche se réunissent pour travailler sur des convergences » se réjouit la secrétaire régionale EELV Bourgogne. Mais dans les faits, le pôle écologiste qui rassemble plusieurs partis, a déjà annoncé qu’il partirait seul derrière sa tête de liste, la Dijonnaise Stéphanie Modde. "Rien n’est figé", nuance la représentante écologiste de Saône-et-Loire. "Les élections sont en juin. On ne va pas rester figés sur des candidatures. Ce qui compte c’est le projet. Si il y a un projet cohérent, ambitieux et qui a un cap clair, les choses sont ouvertes. Mais cela pose la question de l’incarnation de la tête de liste aux régionales." Une incarnation qui, pour les Verts, doit être écologistes et signe de renouvellement.
Concernant les alliances, le discours n’est d’ailleurs guère différent de celui des Insoumis. « On est assez clair au niveau national et local. La République en marche, c’est l’écologie des déclarations et des renoncements dans les faits. Toutes les personnes qui sont dans des exécutifs avec la République en marche, bien évidemment, on ne fera pas de coalition avec eux, puisqu’on ne partage pas le même projet. »
"Rien n'est figé" ?
Derrière les appels au rassemblement, tout le monde semble donc décidé à partir de son côté. Une expression revient néanmoins chez les écologistes comme à la France Insoumise : « Rien n’est figé. » Chacun renvoie cependant la responsabilité aux sortants.
Une candidate Franc-Comtoise
Reste une inconnue : la décision personnelle de Marie-Guite Dufay. La présidente sortante a déjà dit qu’elle se prononcera en mars. Un faux suspens ? « Je pense qu’elle tergiverse aussi parce qu’elle ne sait pas si elle doit y aller » veut croire un opposant à gauche. "Il y a une equipe sortante, il y a une présidente sortante. Voilà. On gère la région actuellement. Il y aura le moment de la campagne le temps venu" répond Michel Neugnot, vice-président du conseil régional.
Cette fois, Gilles Platret, maire de Chalon-sur-Saône et tête de liste Les Républicains est parti le premier dès cet automne. Depuis, Julien Odoul pour le Rassemblement national s'est lui aussi déclaré. La majorité sortante, mais aussi La République en marche, sont parmi les derniers à ne pas s’être prononcés.
A bientôt 72 ans, après avoir présidé la Franche-Comté de 2008 à 2015 puis la Bourgogne Franche-Comté, Marie-Guite Dufay est aujourd'hui à la tête d'une majorité sortante qui réuni des partisans de la République en Marche jusqu'aux membres de Génération's, le parti de Benoit Hamon. Elle présente aussi un atout dans une grande région encore clivée : être Franc-Comtoise face à 3 autres têtes bourguignonnes. De quoi, peut-être rallier des électeurs franc-comtois en quête de proximité.
En 2015, arrivée troisième du premier tour loin derrière le Front national et devancée par la droite, la liste portée par Marie-Guite Dufay s’était imposée de 20 000 voix au deuxième tour. A l'époque, elle faisait face à un candidat issu de la droite centriste, François Sauvadet. Cette année, la majorité sortante fait face à un candidat issu de la droite des Républicains. Peut-être l'une des raisons de ne pas fermer tout de suite la porte d'une alliance au centre pour convaincre les modérés. "Rien n'est figé" disent de toute façon, ses adversaires à gauche.