Arkéa Ultim Challenge. "Tout ce qui est arrivé aux uns peut arriver aux autres". Avec les trimarans volants, ça passe ou ça casse

Les six marins de l'Arkéa Ultim Challenge sont partis comme des bolides, le 7 janvier de Brest, pour un tour du monde en solitaire. Alors qu’on n’a pas encore atteint la mi-course, 5 bateaux ont déjà cassé, même si tous restent en course. Tout se passe comme si on entrait dans une nouvelle ère de la course au large : avec ces trimarans géants montés sur foil, on gagne ou on casse.

"On est partis sur un marathon, pas sur un sprint". Le 7 janvier dernier, sur la ligne de départ à Brest, Armel Le Cléac’h avait annoncé la couleur. "Pour gagner, l’Arkea Ultim Challenge, il faut ménager sa monture." Et savoir ne pas aller trop vite. Un paradoxe pour ces bolides taillés pour les records de vitesse et qui, depuis quelques années, font basculer la voile sportive dans une autre dimension.

Trois semaines plus tard, alors que l’actuel leader de la flotte, Charles Caudrelier, n’a pas atteint la mi-course, il y a déjà eu beaucoup de casse. 

LIRE : Arkéa Ultim Challenge 2024. Classement et cartographie en direct. Caudrelier, loin devant. Coville en 2e position, Le Cléac'h passe 3e

5 bateaux sur 6 endommagés

Le 14 janvier, Armel Le Cléac’h (Maxi Banque Populaire XI) connaît des soucis de balcon à l'avant de la coque centrale et sur un foil. Il doit faire une escale technique à Recife au Brésil pour réparer. Les skippers engagés sur ce tour du monde en solitaire sont autorisés à effectuer un arrêt au stand au minimum pour 24h.

Le 17 janvier, c’est Thomas Coville, plus vieux loup de mer de la flotte, qui voit son système de descente de foil tribord cassé. S’il ne s’agit pas d’une avarie structurelle, le skipper de Sodebo Ultim 3 reconnaît "être handicapé sur un bord". Il assure "avoir la solution pour retrouver les fonctionnalités du foil" et se dit "confiant pour la suite."

Le 18 janvier, Tom Laperche, 26 ans, benjamin de la course, a vu son bateau gravement endommagé après une collision. Coque déchirée, voie d’eau, le skipper s’est même fait très peur. Le bateau est immobilisé au Cap, en Afrique du Sud depuis le 22 janvier. L'équipe technique du SVR-Lazartigue est sur place pour inspecter les dégâts et étudier toutes les options possibles, y compris celle d'un abandon.


Mardi 23 janvier, victime d’une avarie, Anthony Marchand (Actual Ultim 3) se détourne à son tour vers Cape Town. Il a apponté ce vendredi.

Enfin, ce 26 janvier, Eric Péron, dernier au classement, a endommagé le safran tribord du bateau. "Avec un safran incontrôlable et sans secteur de barre de rechange", il n’est pas raisonnable de s’engager dans l’océan Indien. Le skipper d'Adagio a donc pris la direction, lui aussi, du Cap en Afrique du Sud qu’il devrait rejoindre ce dimanche matin.

Le port sud-africain se retrouve désormais à abriter la moitié de la flotte de l'Ultim Challenge.

"La course est plus créative que nous"

Loin d’être démoralisée par ces avaries à répétition, la direction de course y voit au contraire une course haletante. Conformément aux prévisions, ce n'est plus un simple tour du monde en solitaire, c’est une aventure. Un peu comme lors du premier Vendée Globe, en 1989, quand 13 marins s’étaient élancés vers l’inconnu.

"Il y a une forme d’inconfort, beaucoup de risque de casse, admet Joseph Bizard, directeur général d'OC Sport Penduick, société organisatrice de la course. C’est pourquoi on a instauré des escales possibles".

Force est de reconnaître que les skippers, même s’ils doivent s’arrêter plusieurs jours, ne renoncent pas. Et s’accrochent à leur rêve de victoire. "C’est beau, soutient Joseph Bizard. Ils ont raison. On est encore loin d’avoir vu tout le déroulé de l’épreuve. Tout ce qui est arrivé aux uns peut arriver aux autres. La course est plus créative que nous".

L’enjeu n’est pas d’être à 100% du potentiel du bateau, mais d’être au meilleur potentiel du bateau pendant 100% de la course

Joseph Bizard

Directeur général OC Sport Pen Duick

Le directeur de l’épreuve se dit tout aussi admiratif des skippers actuellement à terre que de Charles Caudrelier, qui trace sa route en tête et à bonne vitesse. Ce jeudi, en fin de journée, le skipper a franchi le 2e cap des trois caps qui émaillent l'Ultim Challenge, le cap Leeuwin, à la pointe Sud-Ouest du continent australien, après 18 jours 5 heures 44 minutes et 5 secondes.

Un temps record qui permet au marin d’établir une nouvelle référence en solitaire entre la pointe bretonne et le deuxième cap emblématique du tour du monde. "C’est passionnant de suivre la performance de Charles" se réjouit Joseph Bizard.

Ce format de course renforce le caractère extrême de la performance humaine, à mi-chemin entre sport et aventure. La direction de l'Ultim Challenge refuse de parler de course par élimination. Car tout le monde peut réparer et repartir, un peu comme sur le "Dakar", où pilote et copilote doivent savoir faire tourner leurs méninges, et pas seulement compter sur une mécanique performante. Sauf qu'ici, les marins sont en solo.

Comme le disait Loïc Peyron il y a quelques années lors d’un Vendée Globe, "le premier moyen de gagner une course, c’est de la finir".

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