En train ou à vélo : comment le Centre-Val de Loire veut développer la mobilité dans les prochaines années

La région a déposé, il y a une semaine, ses priorités en matière de mobilité pour la période 2021-2027. Le président de la région, François Bonneau, nous explique ce qui est prévu.

L'échéance est des plus importantes : en ce début d'année 2022, le Centre-Val de Loire va signer avec l'État le contrat de plan État-région (CPER) pour la période 2021-2027, document qui programmera un certain nombre de financements sur toute la durée du mandat de l'actuel conseil régional.

Sur ces financements, une très large partie est dédiée à la mobilité. En début de semaine dernière, la région a ainsi déposé à la préfecture ses divers projets à inscrire dans le CPER, dans l'attente de la définition de leurs financements et de leur échelle de priorité. Le président de la région François Bonneau (PS) explique pour France 3 Centre-Val de Loire le contenu de ce document.

La ligne Orléans-Châteauneuf, enfin... et même Gien ?

C'est peut-être LE projet de mobilité qui a le plus déchaîné les passions pendant la précédente mandature. Après 30 ans de négociations, de projections, de fantasmes, la possibilité d'une ligne ferroviaire entre Orléans et Châteauneuf-sur-Loire, dans le Loiret, était enterrée en 2018. En cause : le refus du préfet de l'époque de signer la déclaration d'utilité publique.

Pour François Bonneau, trois ans, ça suffit. Une nouvelle étude avait été lancée il y a un an, et "ses conclusions sont actuellement en discussion", assure-t-il. Selon l'étude, "il semblerait que nous puissions aller vers une ligne avec des trains légers, avec un meilleur cadencement", et même un objectif "à terme" de réouverture de la ligne jusqu'à Gien, 40 km plus loin que prévu.

La volonté du président de la région : achever les études techniques et même lancer des travaux avant la fin de la mandature. La précédente étude avait conclu à un budget de plus de 200 millions d'euros, dont plus de 60 millions rien que pour l'électrification du trajet. La région espère cette fois-ci faire des économies en utilisant des rames légères, fonctionnant à l'hydrogène "dès qu'elles seront suffisamment développées, notamment par Alstom", explique François Bonneau.  

Mais attention : des plus petites rames peuvent être synonymes d'une "moins bonne capacité, alors qu'on veut ouvrir la ligne pour que les gens prennent moins la voiture", avertit Jean-François Hogu, président de la délégation en Centre-Val de Loire de la fédération nationale des associations d'usagers de transports (FNAUT).

De façon générale, il remet en cause la faisabilité à relativement court terme du prolongement vers Gien. Car si la ligne doit être simplement remise en service entre Orléans et Châteauneuf, elle doit être recréée presque entièrement au-delà, après un déclassement de l'ancienne voie. "Si on veut des franchissements de route pour éviter des passages à niveau, créer un site propre en zone urbaine, ça va être long et cher", ajoute Jean-François Hogu.

De plus, il milite pour que la ligne arrive directement aux gares d'Orléans ou des Aubrais sans rupture de charge, condition sine qua non selon lui à l'attractivité du ferroviaire. Le problème, c'est que la création même d'un quai supplémentaire dédié en gare d'Orléans avait été refusée par le maire de la ville Olivier Carré en 2017. Un des éléments ayant coulé la déclaration d'utilité publique...

François Bonneau propose donc, comme solution pérenne ou provisoire, d'installer un terminus à Saint-Jean-de-Braye. Avec quatre stations du tramway B se situant à proximité directe des rails de la ligne Orléans-Châteauneuf, une correspondance de quai à quai entre les deux moyens de transport pourrait être créée.

Chartres-Orléans, le retour

Cela fait tout pile cinq ans que la ligne Chartres-Voves a accueilli son premier aller-retour en train depuis 1942. 71 millions d'euros de travaux qui ont réduit de près de 20 minutes le trajet entre les deux gares, et qui permet enfin de relier Chartres et Tours, liaison jusqu'alors inexistante par rail. Que ce soit par correspondance à Voves ou, depuis un an, par des trains directs. Et déjà en 2016, l'objectif était affiché : rouvrir le tronçon Voves-Orléans (actuellement réservé au Fret) et enfin relier la préfecture de l'Eure-et-Loir et la capitale de la région. Ouverture en 2020, disait-on.

2021 s'achève, et les travaux n'ont même pas commencé. "La région a réorienté tous les moyens vers la réalisation du Orléans-Châteauneuf, qui ne s'est même pas concrétisé", regrette Jean-François Hogu.

Car le projet est complexe : il faut éviter la base militaire de Bricy, supprimer de nombreux passages à niveau, ou encore créer des haltes ferroviaires au cœur de la Beauce. Le vice-président chargé des Transports Philippe Fournié expliquait à France Bleu Orléans en novembre 2018 que "donner une date serait une promesse de Gascon". Autrement dit : en attendant que l'État redonne des  garanties financières, la région se refusait à prendre le dossier seul en main.

Cette fois-ci sera-t-elle la bonne ? François Bonneau ne donne toujours pas de date, mais veut inscrire le projet comme une "priorité" au CPER, et souhaite la réalisation de nouvelles études.

Améliorer la ligne Paris-Orléans-Châteauroux-Limoges

La ligne Paris-Orléans-Limoges-Toulouse (POLT), qui dessert également le nord du Loiret, la Sologne, Vierzon et Châteauroux, est l'une des grandes lignes structurantes du réseau français. Une ligne "que l'État a laissé de côté avec l'arrivée des LGV", constate François Bonneau. Dans le cadre du précédent CPER, l'État avait dédié 150 millions d'euros à d'importants travaux de modernisation de la ligne.

Suffisant pour sauver, mais pas assez pour développer. C'était en tout cas les conclusions rendues par le collectif Urgence Ligne POLT en 2018, qui estimait que le temps de trajet Paris-Limoges pouvait être réduit de 45 minutes avec un changement de matériel roulant et d'importants investissements sur l'infrastructure. 

Le président du collectif Urgence Ligne POLT avançait alors un coût avoisinant les "deux milliards d'euros". Car, entre rénovation du ballast, suppression de passages à niveaux pour faire rouler les trains plus vite et remplacement des rails, il faudra des fonds. Sur la précédente mandature, 500 millions d'euros y ont déjà été investis, moitié par la région et moitié par l'État. Et il y a un an, le ministre des Transports Jean-Baptiste Djebbari promettait 257 millions d'euros pour la modernisation de la ligne. Il en manque encore, mais le total demandé approche.

Alors François Bonneau l'assure : "Je serai attentif à ce que la ligne POLT soit inscrite en priorité dans le futur CPER", car elle "assure un lien entre le sud de la région, Orléans et Paris, un axe indispensable à la mobilité dans la région". Une rénovation et une modernisation qui entrent dans les projets de son vice-président au Climat Charles Fournier (EELV) qui, candidat, souhaitait il y a quelques mois "qu'on puisse relier toutes les capitales régionales" en train. Avec comme idée d'orienter l'attractivité vers Orléans et vers l'intérieur de la région plutôt que vers Paris.

Rénover les petites lignes

Autre point important pour le président de la région : les lignes du quotidien, à savoir six lignes dont la gestion a été récupérée par le Centre-Val de Loire auprès de l'État. Ces six lignes sont :

  • Dourdan-La Membrolle (Paris-Châteaudun-Vendôme-Tours)
  • Chartres-Courtalain
  • Bourges-Montluçon
  • Salbris-Valençay (Ligne du Blanc-Argent)
  • Tours-Loches
  • Tours-Chinon

Des premières phases de travaux, nécessaires pour "sauver" ces lignes, ont déjà débuté en 2021, notamment sur Tours-Loches, Tours-Chinon et Tours-Vendôme. Au mois de janvier, viendra le tour de Vendôme-Châteaudun. Le tout financé par la région.

Restent trois lignes, inscrites également dans le protocole État-région. Pour l'axe Bourges-Montluçondes travaux sont envisagés pour 2022-2026, l'État étant 100% financeur. Pour la ligne du Blanc-Argent, 20 millions d'euros de travaux ont été annoncés par Philippe Fournié, rapporte La Nouvelle République. Pour Chartres-Courtalain, la région se dit "en discussion avec l'Etat", les deux se partageant le financement à 60-40. François Bonneau assure ainsi qu'il faudra inscrire de nouveaux travaux au CPER 2021-2027. 

Jean-François Hogu, président de la FNAUT du Centre, craint en revanche qu'il soit "difficile de demander de l'argent à l'État après avoir demandé la gestion des lignes". Lui-même aurait espéré que tous les travaux soient menés d'un coup pour une ligne plutôt que de "fermer la ligne 4 mois tous les x années". Car les travaux de la ligne Tours-Loches notamment concernent un sauvetage d'urgence, mais pas une modernisation complète, qui demanderait des suppressions de passages à niveau notamment. Par manque de fonds, la région s'est retenu d'investir plus jusqu'à présent.

Investir sur le vélo

François Bonneau affiche une ambition : faire de la région "la première région sur l'emploi du vélo au quotidien", pour les trajets domicile-travail et pour les étudiants :

Aujourd'hui, il est possible de rejoindre en vélo à assistance électrique des villes à 15 ou 20 km. C'est cela qu'il faut faciliter.

François Bonneau, président du conseil régional

Au programme : le financement de nouvelles pistes cyclables en site propre, un renforcement des lieux d'accueil dans les gares par exemple, ou encore la multiplication des bornes de recharge. "Grâce à l'assistance électrique, des gens qui ne prenaient pas le vélo envisagent de le faire, et d'autant plus si ils se sentent en sécurité" sur leur deux-roues, argumente le président de la région. "Nous allons discuter des priorités à donner pour aller dans ce sens."

Quelques autres projets en vrac

Le président de la région insiste aussi sur la nécessité de moderniser "les étoiles ferroviaires", où les trafics se croisent et se rencontrent. C'est notamment le cas aux Aubrais et à Saint-Pierre-des-Corps. 

Il souhaite aussi inscrire la création de nouveaux réseaux express métropolitains, à savoir de nouvelles lignes de tram dans les grandes villes de la région.

Pour le moment, aucun de ces éléments n'est priorisé, ni ne bénéficie d'une enveloppe financière chiffrée. Durant les prochaines semaines, vont s'ouvrir "les discussions et les évaluations des coûts pour aboutir à des priorisations", explique François Bonneau. Mais pour lui, aucun doute : "La mobilité doit être un élément central de la préparation de demain, la mobilité décarbonée, et ça passe par le rail." Reste à savoir si les moyens accordés seront à la hauteur des ambitions... et des attentes.

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