La production de miel, dans le Tarn et au-delà, pourrait être divisée par trois. La faute à la sécheresse et à la vague de chaleur qui s’est abattue sur toute la France. La saison s’annonce catastrophique et suscite l’inquiétude d'Éric Bedouet, président de l'Abeille Tarnaise.
Manquera-t-on de miel en 2022 ? Les températures caniculaires ont fortement ralenti la production. Dans le Tarn, le syndicat départemental d’apiculture l’Abeille Tarnaise fédère 400 adhérents, soit plus de 26 000 ruches.
Trois questions à son président, Éric Bedouet, apiculteur à Saint-Julien-Gaulène, à l'ouest d'Albi.
France 3 Occitanie : Quelles ont été les conséquences de la sécheresse sur les ruches ?
Éric Bedouet : Je suis installé depuis 2000. L’an dernier, c’était jusque-là notre plus mauvaise année. On n’a pas fait de miel de printemps à cause des gelées, du froid et de la pluie, mais on a démarré la saison début juillet, ça nous a un peu aidés. Cette année, c’est complètement l’inverse et ce sera pire. On a fait un peu de miel de printemps, mais pas de grosse récolte.
Si on cumule les deux années passées, ça fait un bilan correct… Mais il faudrait deux ans pour faire une belle saison. La sécheresse, mais surtout les grosses chaleurs, ont été catastrophiques. Au-dessus de 35 degrés, les plantes se mettent en système de protection : plus d’évaporation, plus de sève qui monte, plus de nectar. La photosynthèse ne se fait plus.
La saison a été à peu près normale jusqu’à la mi-juin. Mais les 40 degrés ont eu raison de la floraison des châtaigniers. Depuis, ça ne "mielle" plus.
À combien se chiffrent ces pertes ?
Sur châtaigniers, on produit en moyenne une quinzaine de kilos par ruche tous les ans. L’année la plus mauvaise, l’année dernière, on a fait une petite dizaine de kilos. Cette année, je pense qu’on ne dépassera pas les 5 kg. Ça fait un gros trou, environ un tiers de notre production.
Beaucoup d’apiculteurs se sont dirigés vers le tournesol. Même s’il y a eu quelques orages, on pensait que ça irait un peu mieux, les fleurs n’avaient pas l’air de trop souffrir et les feuilles n’étaient pas trop rétractées. Généralement, on produit 20 kg par ruche. Cette année, aucune idée, mais ça sera minable…
Pour le moment, on est dans le flou complet.
Éric Bedouetà France 3 Occitanie
Il faudra faire le bilan vers le 15 août, lors de la récolte du tournesol. C’est sec de chez sec de partout, ça ne va pas mieller. Ça inquiète beaucoup de monde. On garde un peu de stock de miel, ça amortit un peu, mais là deux années d’affilée comme ça… J’espère que ça ne va pas continuer, sinon ça va impacter toute la filière.
Dans ces circonstances, attendez-vous un coup de pouce de l’État ?
Pour le moment, on est dans le flou complet. On est en train de voir pour monter des dossiers. On a un conseil d’administration ce soir pour préparer les foires au miel, on va discuter de la problématique des pertes de récolte. Ça préoccupe pas mal de monde. Surtout des jeunes, installés il n’y a pas longtemps, qui ont parfois de gros crédits à rembourser et font face à de grosses difficultés financières.
Dans le Sud-Ouest, c’est une saison noire, une catastrophe. Nos collègues des Landes ou de Bordeaux, en plus de la saison lamentable, ont perdu des ruches dans les incendies. Il y aura des exploitations complètement détruites.
J’espère qu’il y aura un geste de la Chambre d’agriculture et la DDT [Direction départementale des territoires, ndlr]. On est un tout petit secteur dans l’agriculture, et jusqu’à présent, on n’a pas trop été pris en compte.