Mort de Jean-Claude Gaudin : logement, écoles, démêlés judiciaires... Comment les affaires ont marqué son mandat de trop

Elu à la tête de la ville en 1995, Jean-Claude Gaudin a accompli quatre mandats de maire. Le dernier a été marqué par plusieurs affaires qui ont terni sa fin de règne.

Jean-Claude Gaudin a incarné Marseille pendant 25 ans. Son décès lundi 20 mai, à l'âge de 84 ans a surpris ses amis comme ses anciens adversaires, qui ont salué unanimement sa longévite politique et sa stature d'homme d'Etat. L'enfant de Mazargues a réalisé son rêve en s'asseyant dans le fauteuil de Gaston Defferre, mais il a connu une fin de règne compliquée. S'il a accompli de grands projets pour sa ville au cours de ses quatre mandats,  le dernier est très critiqué par adversaires, souvent jugé comme celui de trop, marqué par le scandale de l'habitat indigne, les écoles vétustes et ses démêlés judiciaires. 

Le drame de l'habitat indigne

L'ombre des défunts de la rue d'Aubagne a accompagné les dernières années de Jean-Claude Gaudin à la mairie. Le 5 novembre 2018, deux immeubles s'effondrent dans ce quartier populaire du centre de la ville. Huit personnes meurent sous les décombres. L'un des bâtiments effondré appartenait à la mairie.

Ce drame meurtrier révèle au grand jour l'ampleur du mal-logement dans la deuxième ville de France. "Gaudin assassin ! Gaudin démission !". Les slogans rythment la marche de la colère, qui rassemble 8 000 Marseillais en hommage aux victimes le 14 novembre. 

"La rue d'Aubagne, c'est un drame terrible, qui peut arriver à tout moment dans les centres anciens des villes. Surtout que les logements insalubres sont généralement des copropriétés privées. L'un des immeubles s'est effondré et a entraîné les autres. Ça arrive ailleurs, par exemple, Rue de Trévise à Paris où il y a eu quatre morts [après une explosion de gaz NDLR], on n'a pas dit que c'était la faute d'Anne Hidalgo !", avait confié l'ancien maire dans un entretien à France 3 Provence-Alpes, le 31 mars 2021.

Le scandale des écoles délabrées 

En novembre 2015, la lettre ouverte d'une enseignante des quartiers nord à la ministre de l'Education lance la polèmique sur les écoles de Marseille. Murs moisis, classes non chauffées, présence d'amiante, vétusté, rats... Dans un dossier de quatre pages, Libération dresse un état des lieux accablant des établissements scolaires du primaire, dont la mairie a la charge. Certaines sont dans un état d'insalubrité indécent selon le quotidien. "Une description apocalytique" selon Jean-Claude Gaudin qui juge la situation très exagérée et dénonce un "Marseille bashing". Pour les opposants au maire, c'est l'illustration de ce qu'est devenue la ville sous l'ère Gaudin. Les parents eux se mobilisent à coups de concert de casseroles sous les fenêtres du maire. L'onde de choc remonte jusqu'aux plus hautes sphères de l'Etat.

La mairie lance en 2017 un plan Ecole Avenir, un plan à un milliard d'euros qui prévoit la destruction-reconstruction d'une trentaine d' écoles. Mais le projet est retoqué par le tribunal administratif qui rejette le recours à un PPP.

En 2019, la ville a finalement réalisé un audit sur l'état des écoles, confié à deux bureaux d'experts. Les résultats complets ne seront dévoilés qu'après les municipales, en décembre 2020, sous la nouvelle municipalité du Printemps marseillais qui hérite du dossier.

Une suspicion d'emplois fictifs à la mairie

En 2019, la Chambre régionale des comptes dénonce dans un rapport une "gestion des départs en retraite (…) pour le moins coûteuse" à la Ville de Marseille, avec plusieurs maintiens en fonctions jugés "illégaux" de proches du maire à son cabinet. Une information judiciaire est ouverte en juin sur des chefs de détournement de fonds publics par une personne chargée d’une mission de service public, et de recel de ce délit. La chambre pointe qu'onze personnes de plus de 69 ans – et majoritairement de 70 ans et plus – ont été maintenues en activité sur la période 2012 à 2017. Entre autre la doyenne du cabinet du maire, chargée des relations publiques et âgée de plus de 77 ans ou encore Claude Bertrand, salarié de la ville, malgré ses 73 ans à l’époque.

Pour un préjudice de plus d'un million d'euros par an pour la ville. L'ancien maire est placé en garde à vue. "Il a fallu que j'attende 82 ans pour avoir des vistes de gendarmes. J'ai répondu aux cent-vingt questions qu'on m'a posées. La question qu'ils venaient chercher est la suivante : "Y a-t-il eu des emplois fictifs à la ville de Marseille ?" Il n'y a pas d'emplois fictifs à la ville de Marseille ! Il y a simplement, au cabinet du maire, cinq personnes qui avaient dépassé l'âge de 70 ans, et qui continuaient à travailler. S'il n'y a que ça qu'on me reproche, ce n'est quand même pas beaucoup...". 

Une condamnation pour "détournement de fonds publics"  

Le mardi 22 mars 2022, Jean-Claude Gaudin, est condamné à six mois de prison avec sursis et 10 000 euros d'amende pour "détournement de fonds publics par négligence". La justice lui reproche d'après avoir tardé à mettre un terme à un système généralisé d'heures supplémentaires indument accordées à 800 agents municipaux, sans travail effectif, entre 2013 et 2018. "Oui, j’ai été négligent et je ne me suis pas intéressé assez au fonctionnement interne des choses", a reconnu l’ancien maire de Marseille lors de l'audience de plaider-coupable devant la 32e chambre correctionnelle du tribunal de Paris.

Dans un rapport en 2013, la Chambre régionale des comptes (CRC) avait évalué le manque à gagner dû à ce système à dix millions d’euros par an pour le budget municipal, soit 280 équivalents temps plein.

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