Témoignage. Mort de Socayna à Marseille : "je suis une morte vivante, j'ai tout perdu", un an après sa mère est inconsolable

Publié le Écrit par Sidonie Canetto
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Il y a un an, le 10 septembre 2023, la jeune étudiante Socayna est tuée par balle alors qu'elle révise dans sa chambre. Victime collatérale d'une balle perdue au domicile familial, cité Saint-Thys, dans le 10ᵉ arrondissement de Marseille. Malgré le temps qui passe, la douleur et l'incompréhension sont toujours aussi fortes pour sa mère Layla et sa sœur Sabrina.

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Pas de répit, pas de vacances pour la douleur. Layla, la mère de Socayna "ne dort plus, ne mange presque plus depuis la mort de ma fille". Ce 10 septembre, cela fait un an, jour pour jour, que sa vie "a basculé, perde un enfant de cette manière, il n'y a pas pire, c'est un drame unique". Elle a accepté de revenir sur ce qu'est sa vie à présent, depuis le funeste soir.

Le 10 septembre 2023, alors qu'elle était chez elle en train d'étudier, Socayna reçoit une balle perdue de kalachnikov tirée de l'extérieur.  Deux jours après, elle décède des suites de ses blessures. Depuis, la vie de sa famille ne sera plus jamais la même. 

J'attends la justice, le procès

Layla et sa fille Sabrina ont quitté le quartier dans lequel s'est déroulé le drame, mais sont restées à Marseille.

Le temps s'égrène, trop rapidement pour certains, mais pas pour Layla, il est interminable, "j'ai tout perdu, je suis brisée. Je ne travaille plus. Je n'ai plus goût à rien. Je reste chez moi. Je suis une morte vivante, je suis un cadavre". Entre deux sanglots, très digne, Layla reste avec son incompréhension, et seuls les pourquoi résonnent, "pourquoi nous, pourquoi elle ? Elle n'a rien demandé, il lui a pris sa vie, elle était en train d'étudier tranquillement dans sa chambre". 

À la veille "d'aller sur la tombe de Socayna, mettre des fleurs avec une amie", pour la soutenir, Layla attend. "J'attends la justice, le procès, que justice soit faite, même si cela ne me rend pas ma fille chérie, sa sœur unique à Sabrina".

"Ce n'est pas un mineur, c'est un criminel"

Un suspect a été interpellé et devra comparaître devant la justice. Mais cela ne console pas Layla pour autant, qui se sent très seule. 

"En me prenant ma fille, il a détruit ma vie gratuitement, je ne suis plus la même, tout ce que j’ai construit pendant des années est parti en l’air, pour rien".

"On est sur liste d'attente. La justice, on dirait qu'elle cherche du côté de Socayna. Mais il n'y a rien à chercher, elle n'a rien à voir là-dedans, la drogue, les armes", s'impatiente Layla," elle était étudiante, studieuse et en train de réviser quand on lui a pris la vie. Ce n'est pas dans son dossier qu'il faut chercher, il n'y a rien à trouver."

Pourquoi la justice est si lente ?

Layla, mère de Socayna

à France 3 Provence-Alpes

Elle espère de la justice, mais sans rien attendre, car ce qu'elle voudrait plus que tout " c'est le retour de ma fille. Je n'arrive pas à réaliser qu'elle n'est plus là. Parfois, je m'attends à ce qu'elle passe de nouveau le pas de la porte. Je ne peux pas me résoudre à me dire que je ne la reverrai plus jamais".

C'est le cœur d'une mère en miettes qui parle, qui ne pourra jamais se reconstruire et qui en veut terriblement à celui "qui a enlevé la vie de ma fille gratuitement, délibérément". 

Au-delà de la douleur, d'une mère qui perd son enfant, il y a la douleur qu'on lui assène en lui répétant que le suspect est mineur, 17 ans actuellement, 16 à l'époque des faits.

"Pour moi, ce n'est pas un mineur, c’est un criminel, il a enlevé la vie de ma fille gratuitement, c’est son choix donc c’est un criminel. Un mineur, sa place est à l’école, pas avec les kalachs. Donc, il a fait son choix, c’est un criminel. Il a tué trois personnes, Socayna, moi et sa sœur, la sœur unique de Sabrina".

"Changer les statuts"

"Ce sont les mineurs qui tuent maintenant, ils sont protégés, on ne sait pas pourquoi", explique Layla, qui refuse le terme de mineur.

Elle n'en démord pas. "Il faut changer le statut, quelqu'un qui tue une innocente, chez elle, sans cause, dans sa chambre, elle se prend une balle, il faut que ça change, c’est un criminel".

Socayna n'est malheureusement pas la seule victime collatérale du narcotrafic, à Marseille, mais pas seulement. "C’est malheureux, ce qui se passe en France, on dirait que c’est pire que si on était est en guerre. Tu es là, tranquillement chez toi et en deux secondes ta fille se prend une balle et ta vie bascule. Pourquoi ?"

"Je ne veux plus entendre, c’est un mineur. Son avocat, il se base sur quoi pour le défendre ? Sa seule défense, c'est qu’il soit mineur ? Il peut utiliser des armes de guerre, il peut rafaler à gauche à droite parce qu’il est mineur ? C’est terrible", s'emporte Layla qui répète "il m’a tout pris".

Depuis la mort de Socayna, trois autres personnes sont mortes à Marseille, victimes collatérales des règlements de comptes liés à la drogue, les narchomicides. L'adjointe au maire des quartiers nord, Samia Ghali a demandé en 2023 "la mise en place d’un statut de victime civile de guerre". "Il faut une réponse à long terme", a-t-elle déclaré, "c’est l’approche globale, mais l’urgence est aussi d’aider ces victimes innocentes qui, aujourd’hui, tombent sous les balles."

Ce samedi, Laya et sa famille participeront à une marche blanche pour toutes les personnes qui ont perdu un enfant tué à l'arme de guerre.

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