"C’est nous qui payons le prix", des viticulteurs cassent des bouteilles devant un supermarché et laissent parler la colère

Pour dénoncer la crise viticole, des viticulteurs se sont coordonnés ce lundi 4 novembre pour mener une action coup de poing devant le supermarché Lidl à Orange, dans le Vaucluse, mais aussi dans la Drôme et dans le Gard. Ils dénoncent une offre promotionnelle de l’enseigne.

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Ils étaient, en tout, une cinquantaine, réunis très tôt ce lundi matin, devant un supermarché Lidl à Orange dans le Vaucluse. Des producteurs de vin qui ont voulu mettre “un coup de projecteur” sur une problématique majeure : celle des prix. 

Ils achètent des bouteilles pour les casser

Dès 9h30, Les viticulteurs sont entrés dans l'enceinte du magasin ciblé pour y acheter toutes les bouteilles de vin rouge de Côtes-de-Rhône du rayon. L'objectif était clair : se les procurer pour faire du bruit devant les clients et la presse présente. Des bouteilles ont été cassées devant le magasin et sur le sol une mare de vin s'est répandue. “La bouteille est à moins de 2€, le prix du litre est trop bas”, explique une membre des Jeunes agriculteurs du Vaucluse. 

Jordan Charransol, président des Jeunes agriculteurs du Vaucluse explique : “ce matin, tout le monde était un peu en colère. On a cassé quelques bouteilles pour se faire entendre. Beaucoup de personnes présentes ont applaudi l’initiative, car elle a permis de mettre en lumière notre situation.”

"Des prix indécents" : les raisons de la colère 

Pour la FDSEA, syndicat agricole majoritaire, “les négociants, moins nombreux que les producteurs, en profitent pour imposer des tarifs au rabais. On veut toujours connaître la marge du producteur, mais jamais celle du distributeur”.

 L'un de ses représentantes va plus loin, et avertit des conséquences à long terme : “Si demain les exploitations font faillite, entreprises et consommateurs devront se contenter des produits importés, souvent remplis de produits chimiques”.

“On nous demande de produire mieux, mais toujours au même prix”

La FDSEA estime que les viticulteurs payent le prix des exigences croissantes. “On nous demande de produire plus vert, plus bio, mais c’est encore nous qui payons le prix… On nous demande de produire mieux, mais toujours au même prix”, regrettent-ils.

Jordan Charransol souligne l'impact de ces prix bas pour les viticulteurs : “Lidl vend la bouteille à 1,99€ pour la première, et 1,29€ pour la deuxième. À ce prix-là, aucun viticulteur ne peut vivre. Pour une AOP  — label européen  , cela représente à peine 80 centimes le litre, bien en dessous de nos coûts de production.” Lidl va même jusqu'à proposer une offre commerciale ponctuelle du 18 au 20 octobre à 1,69€ la bouteille pour l’achat simultané de 2 bouteilles.

Selon lui, “le coût de production minimum est de 1,40€”, dont “seulement 40 centimes reviennent au vin lui-même, le reste correspondant aux emballages, bouchons et autres frais”. 

Leur revendication est claire : “Nous demandons un prix de vente minimum de 3€ par bouteille. Le consommateur a un rôle à jouer : un vin de qualité devrait se vendre entre 3 et 5€".

Lidl répond : "il faut que tous les acteurs se mobilisent ensemble"

À la suite de cette mobilisation, Lidl répond :"nous sommes tout à fait conscients des difficultés rencontrées par les vignerons. Il y a une déconsommation forte du vin, notamment du vin rouge depuis plusieurs années en France."  Lidl réfute, par ailleurs, l'accusation d'acheter à prix bas : "nous ne négocions pas les vins que nous achetons :  nous acceptons des offres pour dégager des volumes."

L'enseigne appelle à " l’intervention des pouvoirs publics sur la situation de la profession viticole française. Il faut que tous les acteurs se mobilisent ensemble. C’est collectivement que la solution doit être trouvée."  Lidl affirme représenter près de 8% du marché de la grande distribution et refuse de "porter la responsabilité de pratiques de l’ensemble des acteurs"

Une crise qui persiste 

Cette action s'inscrit dans la continuité de celles menées l'an dernier. “L’année dernière, nous avions déjà mené une action contre des prix en dessous des coûts de production,” rappelle le président des Jeunes agriculteurs du 84. “Nous voulons simplement pouvoir vivre de notre métier, ce qu’on veut, c'est un prix décent.

Il alerte sur cette bataille qui menace les exploitations viticoles, qui semble connaître un "déclassement social" : “On est pour la plupart des entreprises familiales qui se transmettent le savoir-faire pour continuer à fructifier ce commerce des vignes AOP. Mais c’est une guerre constante des prix des grandes distributions, ils veulent réaliser le maximum de bénéfices. C'est toujours la politique du prix bas pour faire maximum de marge... ”

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