Le procès de la fusillade de Beaune de 2018 s'ouvre aux assises de Dijon

Ce jeudi 16 novembre 2023 s'ouvre devant la cour d'assises de la Côte-d'Or le procès de la fusillade de Beaune (Côte-d'Or). En 2018, deux hommes avaient tiré sur des jeunes du quartier Saint-Jacques. Les victimes dénoncent une agression raciste.

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Les faits remontent à plus de cinq ans et les victimes devront se replonger dans la nuit d'horreur qu'elles ont vécue le 30 juillet 2018, dans le quartier Saint-Jacques de Beaune (Côte-d'Or). La cour d'assises de la Côte-d'Or juge à partir du jeudi 16 novembre deux hommes, accusés de tentative d'assassinat envers ces jeunes. Le procès tournera autour de la question de l'intention de donner la mort à ces personnes et sur le caractère raciste des faits.

Une quinzaine de jeunes menacés par deux hommes

Dans la nuit du 29 au 30 juillet 2018, une quinzaine de jeunes discutent et jouent à la console à côté du city-park du quartier Saint-Jacques, au sud de Beaune. À 1h15 du matin, leur chaude et paisible soirée d'été est interrompue par l'arrivée à grande vitesse d'une Renault Clio rouge. À son bord, deux hommes.

Selon les témoignages des victimes, l'un des jeunes présents indique au conducteur qu'il n'a pas le droit de rouler dans le parc avant que la conversation ne monte dans les tours et que des insultes ne fusent des deux côtés. Le conducteur de la Clio encerclée force alors le passage, blessant trois jeunes.

D'après les témoignages des personnes présentes, le conducteur tente de percuter le groupe de jeunes et la collision est évitée de peu. "Ils ont commencé à nous agresser, à nous courser. Heureusement que le banc nous a sauvés. Sans lui, je pense que c'était fini pour moi", explique à France 3 Bourgogne une des victimes au lendemain des faits.

"À leurs regards, j'ai vu qu'ils avaient une haine contre nous. Ils ont dit qu'on était des bougnoules, qu'on n'avait rien à faire dans ce pays et qu'ils allaient revenir calibrés"

Une victime de la fusillade

le lendemain des faits

Certains membres du groupe se rendent au commissariat et des hommes de la Bac arrivent sur les lieux sans repérer quoi que ce soit d'anormal. Dans le même temps, les personnes blessées se rendent aux urgences, pensant qu'il s'agit d'un acte isolé.

Mais trois heures plus tard, un autre véhicule, une Mercedes grise, débarque sur les lieux. Le passager ouvre alors le feu avec un fusil de chasse sur le groupe avant que le véhicule ne prenne la fuite. Sept jeunes hommes de 16 à 20 ans sont touchés par les tirs. L'un d'eux, plus gravement blessé, est atteint au thorax, à l'intestin et à l'œil.

Deux hommes au lourd passé judiciaire

Il faudra attendre une dizaine de jours pour que les deux suspects soient retrouvés. Ils sont interpellés le 8 août dans le sud de la France. Lors de l'opération, un des agents des forces de l'ordre est d'ailleurs percuté par le véhicule dans lequel ils se trouvent. Après leur garde à vue à Avignon, ils sont mis en examen pour "tentative de meurtre aggravée par trois circonstances dont la préméditation et le fait que le crime a été commis en raison d'appartenance des victimes à une ethnie, une race, une nation déterminée".

Ces deux hommes sont des Côte-d'Oriens, âgés tous les deux de 36 ans à la veille de l'ouverture de leur procès. Le premier, Loïc B., a déjà été condamné à de multiples reprises pour des vols avec arme ou des faits de violences. Le deuxième, Jean-Philippe K., a lui aussi un casier judiciaire bien fourni. En 2015, il est par exemple condamné pour avoir sorti un sabre lors d'une dispute pour une place de parking à Dijon.

Les deux accusés comparaîtront détenus devant la cour d'assises. Ils se trouvent tous les deux en détention à la maison d'arrêt de Dijon pour des faits commis en 2023 : un délit de fuite pour Loïc B. et des actes de violences pour Jean-Philippe K.

Pas d'intention de tuer ni de propos racistes pour la défense

Si les deux hommes reconnaissent leur présence à Beaune le soir des faits, ils nient tous les deux avoir eu l'intention de donner la mort aux jeunes du quartier Saint-Jacques. "Pendant le procès, les discussions vont tourner autour de cet aspect juridique. Il n'y a pas d'intention d'homicide", assure Ornella Spatafora, avocate de Jean-Philippe K. Même ligne de défense du côté du conseil de Loïc B., Marine Berthelon. "Il y aura aussi des discussions sur le caractère raciste de l'agression, que mon client nie fermement."

"Les victimes tiennent à être présentes face à leurs agresseurs, trop de temps a passé depuis ces faits qui ont changé leurs vies de manière très importante", témoigne à la veille de l'ouverture du procès Samuel Estève, l'un des deux avocats des victimes. Pour lui, l'intention de donner la mort ne fait aucun doute. "Ils ont quand même tiré à hauteur d'homme avec un fusil de chasse et des balles de plomb. On se doute que ce n'est pas pour faire peur comme ça a pu être dit. Aussi, il y a eu deux scènes donc il y a bien préméditation."

Une des victimes détenue dans une autre affaire

Une des victimes, l'une des plus gravement blessées, est d'ailleurs détenue en ce moment pour une autre affaire et ne sera présente au procès que pour témoigner. "Le fait qu'il soit en détention ne change en rien son statut de victime. Il est encore impacté par tout ça. Physiquement et psychologiquement", explique son avocat.

Du côté des parties civiles, plusieurs associations de lutte contre le racisme seront également présentes. C'est le cas de La Maison des potes - La Maison de l'égalité, présidée par Samuel Thomas. "Notre démarche, c'est d'être présents aux côtés des victimes. Elles souhaitent qu'on soit là pendant cette épreuve qu'est le procès.

On revit l'attaque et c'est très dur pour eux, surtout que la procédure a été très longue. Mais on a apprécié que le procureur retienne rapidement le caractère raciste de la fusillade.

Samuel Thomas

délégué général de la fédération nationale de la Maison des potes

"Il faut condamner ce racisme ordinaire et banalisé. 'Bougnoule', ce n'est pas une insulte comme une autre. C'est quelque chose de grave", soutien Laure Abramowitch, avocate de l'association. Le verdict du procès, que vous pourrez suivre sur le site de France 3 Bourgogne, est attendu le jeudi 23 novembre.

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