Des agressions de militants aux invectives, en passant par les erreurs de distribution de propagande électorale, la campagne du 1er tour des législatives a réservé son lot de rebondissements en Franche-Comté. Retour sur trois semaines sous tensions.
La distance était courte. Les obstacles, nombreux. La course, intense. Il aura fallu aux candidats comtois aux élections législatives 2024 un bon cardio pour convaincre les électeurs, dans une ambiance tendue et dans un contexte de recomposition politique. À deux jours du 1ᵉʳ tour, ce dimanche 30 juin, retour sur les rebondissements d'une campagne menée tambour battant.
Crise chez LR : les députés refusent l'alliance avec le RN
Les députés Les Républicains ont été les premiers servis. Quarante-huit heures après le séisme politique provoqué par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron au soir des européennes, la première réplique secoue le parti de la droite républicaine, en difficultés depuis l'élection d'Emmanuel Macron en 2017. Son président Éric Ciotti franchit le Rubicon en décidant, contre l'avis des principaux ténors du mouvement, de s'unir avec le Rassemblement national pour les législatives.
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Tous les députés comtois LR sortants font bloc, de Ian Boucard, dans le Territoire de Belfort à Annie Genvard dans le Doubs. Mais surprise, le jeudi 13 juin, Matthieu Bloch, le maire Les Républicains de Colombier-Fontaine et numéro 2 de la fédération départementale du Doubs, décide de se porter candidat avec le soutien de Rassemblement National dans la 3ème circonscription, où le parti de Jordan Bardella a remporté 40% des suffrages le 9 juin dernier.
"On ne peut pas rester dans un entre-soi à 5-6%. Il faut se rapprocher de ceux qui partagent beaucoup de nos idées", déclarait le candidat à France 3 Franche-Comté. Pendant ce temps, la députée du Doubs Annie Genevard est aperçue en direct, sur toutes les chaînes d'information en continu, rouvrir la porte du siège des Républicains, après sa fermeture exigée par Éric Ciotti.
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Du mouvement dans la 2e circonscription du Doubs
Toujours dans le Doubs, autre surprise : le député sortant de la deuxième circonscription Éric Alauzet décide de retirer sa candidature, évoquant le contexte "difficile" de majorité relative à l'Assemblée depuis deux ans, un risque d'"ambiance délétère à l'Assemblée", les "violences orchestrées par les élus de la France Insoumise" et pour des considérations plus "personnelles" et "familiales". C'est Benoit Vuillemin, maire de Saône et chef d'entreprise, qui s'est porté candidat à sa place.
Un candidat qui se retire, et une autre qui revient. Dominique Voynet, ancienne ministre de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement de Lionel Jospin, est redescendu dans l'arène politique, en se portant candidate dans la 2ᵉ circonscription du Doubs.
De la "Gauche plurielle" en 1997, au Nouveau Front populaire en 2024. Ancienne députée du Jura, l'anesthésiste-réanimatrice de profession avait déjà entamé un début de retour en devenant la patronne des Verts en Bourgogne-Franche-Comté. Elle se retrouve aujourd'hui candidate dans une circonscription où le total de la gauche aux européennes dépasse le score du Rassemblement national (26%).
Campagne agitée dans le Territoire de Belfort
Si la campagne du premier tour a réservé des surprises dans le Doubs, elle a été tendue dans le Territoire de Belfort. Quelques jours après l'annonce de la dissolution, le Rassemblement National annonce investir Guillaume Bigot dans la 2ᵉ circonscription du Territoire de Belfort.
Une circonscription aujourd'hui aux mains de la France Insoumise, mais où le RN a réuni 32,25 % des suffrages aux européennes, loin devant la liste de LFI (10,94%). Le politologue et ancien directeur d'école de commerce est un visage bien connu des téléspectateurs de CNEWS, où il livre régulièrement ses analyses et débat aux côtés d'autres intervenants.
Installé à Paris, le candidat RN aime rappeler son soutien à Jean-Pierre Chevènement en 2002, figure du département. Mais ses adversaires ne manquent pas de pointer du doigt un "parachutage". Comme lors du débat, où il lui a été demandé de citer 10 communes de sa circonscription.
- Vous pouvez citer 10 communes de la circonscription?
— Jérémy Chevreuil (@JeremyChevreuil) June 19, 2024
- Je ne suis pas là pour répondre à un interrogatoire. Je viens d'arriver.
Vif échange autour de @Guillaume_Bigot, candidat RN parachuté à #Belfort, avec @FlorianChauche9 & @DidierVallverdu #circo9002
📺21h @f3franchecomte pic.twitter.com/xaw84BKEB6
La campagne dans la 2ᵉ circonscription du Territoire de Belfort n'aura décidément pas été un long fleuve tranquille. Quelques jours plus tard, le député sortant de la France Insoumise Florian Chauche dénonce des insultes et attaques physiques visant plusieurs de ses soutiens lors d'un tractage.
L'un des militants se serait fait insulter de "sale bougnoule". Une plainte pour injure publique en raison de la race, de la religion ou de l'origine a été déposée. Florian Chauche assure que les insultes émanaient de "personnes affirmant avec force leur soutien au Rassemblement national" et a dénoncé un "racisme décomplexé".
L'affaire du fichier électronique volé
Situation toujours tendue dans le Territoire de Belfort, quand Damien Meslot, maire Les Républicains de Belfort, a accusé le Rassemblement national de démarcher des adhérents LR à l'aide d'un fichier informatique dérobé illégalement. Au moins cinq militants auraient été démarchés par la même personne, selon l'édile. Une accusation niée en bloc par le RN. "Ce sont des basses manœuvres des Républicains, qui sont sûrement très agacés par l'éclatement de leur parti", a répondu Guillaume Bigot, le candidat RN de la 2ème circonscription du Territoire de Belfort.
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La tension est aussi montée d'un cran dans le Doubs. Dans la 1ʳᵉ circonscription du Doubs, un membre de l'équipe de la candidate du Nouveau Front Populaire Sévérine Vézies a dénoncé l'agression d'un militant de La France Insoumise par un soutien présumé du Rassemblement National, le 25 juin, dans le quartier de Planoise à Besançon, alors qu'il collait une affiche pour la candidate. L'individu aurait ainsi essayé de le frapper avec "un manche à balai". Une plainte devait être déposée.
Dans la 2ᵉ circonscription du Doubs, ce sont aussi les affiches du candidat Les Républicains et maire de Malbrans, Daniel Roy, qui ont été ciblés d'injures et de tags nazis, près du bureau de vote du Kursaal à Besançon. Des tags et arrachages qui sont assez réguliers.
Où sont les bulletins de Matthieu Bloch ?
On savait la distribution des professions de foi compliquée. Les retards sont fréquents lors des scrutins. Mais dans le cas de Matthieu Bloch, candidat LR allié avec le RN dans la 3ᵉ circonscription - déjà évoqué plus haut dans cet article - les bulletins ne sont tout bonnement pas arrivés dans les boîtes aux lettres.
Contacté par France 3 Franche-Comté ce vendredi 28 juin, Matthieu Bloch dénonce un "dysfonctionnement démocratique" et une "rupture d'égalité entre candidats". La préfecture mène une enquête. Selon nos informations, il s'agirait d'une erreur logistique dans la réception des bulletins, que le candidat a fait envoyer par une agence de communication.