L'environnement est devenu l’une des priorités des Français. Des promesses écologiques fleurissent dans la majorité des programmes. Un enjeu majeur de ces élections municipales.
Pour un Français sur trois, l'environnement doit être l'une des priorités d'un maire. C'est le bilan du sondage Odoxa-CGI réalisé pour Franceinfo en décembre dernier.
"Quand on mesure, la place de l’environnement et de la lutte contre la pollution dans les 120 villes de plus de 50 000 habitants, l’environnement arrive juste derrière la sécurité", confirme Jean-François Doridot, directeur général de l'institut de sondage Ipsos-Public Affairs.
2e priorité dans les 120 plus grandes villes
L’institut de sondage Ipsos-Public Affairs a réalisé des enquêtes locales dans une vingtaine de villes. Parmi elles, Rouen est la seule ville où l'environnement est le sujet dont la Municipalité devrait s’occuper en priorité dans les années à venir. Pour 54 % des habitants, contre 39% à l’échelle nationale. “Effet Lubrizol ? En partie sans doute...Mais l’environnement a toujours été une préoccupation forte à Rouen, " selon jean-François Doridot.
2019 : le tournant d’une prise de conscience
"2019 marque un tournant dans les préoccupations écologistes des Français".C’est le constat de Daniel Boy directeur de recherche à Sciences Po, spécialiste des mouvements verts en France : "Traditionnellement, la place de l’environnement arrivait en fin de liste. “Aujourd’hui, face aux dangers qui menacent notre planète,
Depuis un an, le réchauffement climatique devient un sujet brûlant, donc une préoccupation majeure : "Récemment, face à l’inaction des gouvernements, dans une tribune du Monde, 1000 scientifiques ont même incité les gens à la désobéissance civile et au développement des alternatives"la protection de l’environnement s’impose au premier rang des inquiétudes des français."
Lors des élections européennes, poursuit le politologue, "les sondages n’avaient pas prévu l’émergence de verts : la liste Jadot a obtenu 13, 5 %. Et si les préoccupations écologistes se traduisent dans les urnes, il s’agit bien d’un enjeu politique".
Un constat confirmé par Jean-françois Doridot
quand on demande aux Français quelles sont leurs préoccupations personnelles, l'environnement s'impose, avec les inégalités sociales et le système de santé, pour 40 %.
Pour le directeur de l’institut Ipsos-Public Affairs,“ce sentiment est plus fort à gauche qu’à droite, et s’avère être une priorité plus importante chez les cadres que parmi les catégories populaires. Jusque là, l’environnement était relayé derrière les questions de terrorisme et de sécurité, et de chômage. Aujourd’hui,“nous sommes dans une situation plus sereine dans ces domaines", confirme le directeur de l'Institut de sondage.
Une jeunesse qui fourmille d’idées écolos
L’environnement est une préoccupation beaucoup plus élevée chez les moins de 35 ans, avec 46, 47%, selon le sondage de l’institut Ipsos-Public Affairs. A Grenoble, + de 50 % des jeunes expriment leurs intentions de vote pour Eric Piolle, le maire EELV de la ville. Dans un contexte ou la sécurité apparaît au coeur des débats.Idem à Rouen où la liste EELV ( Europe Ecologie les verts) arrive en tête des intentions de vote des jeunes. A la question “si j’étais maire”, les jeunes français interrogés ne manquent pas d'idées pour défendre la planète : développement du bio, composteurs dans les immeubles, végétalisation des villes, développement des pistes cyclables et transports en commun, tri sélectif dans les écoles...
Pour en savoir plus sur les enjeux environnementaux dans les principales villes françaises, vous pouvez vous cliquer sur cette carte intéractive.
La campagne n’a jamais été aussi verte
C’est une attente essentielle des Français, toutes les études le disent. L’écologie s’impose dans les programmes, surtout dans les grandes villes : il n’y a jamais eu autant de vert… De la part de toutes les listes au presque. “Partout il y a un paragraphe concernant la protection de l'environnement.”constate Daniel Boy, le spécialiste des mouvements verts en France à Sciences Po.Pour Jean-François Doridot "l’environnement est un incontournable. Une liste traditionnelle de droite est obligée d’aborder le sujet dans son programme."
Les questions environnementales sont, dans la majorité des villes, au cœur des débat des municipales, comme à Grenoble, une des villes pionnière dans ce domaine. Eric Piolle, le maire, a été le premier à fixer une taxe d'enlèvement sur les ordures ménagères.
“Le fait de se donner une posture écolo donne une chance d'être élu“, continue Daniel Boy.
Le vélo omniprésent dans les campagnes
Loin d’être une priorité il y a quelques années, le vélo est en train de s’imposer comme un enjeu des élections municipales 2020.Écologique et économique, à Bordeaux, le vélo est "LE"
sujet de la campagne. A les écouter, tous les candidats veulent faire de la ville un petit paradis du deux roues.
A Nantes, les cyclistes veulent peser."Si l'on veut que le vélo atteigne 12% des déplacements urbains, il va falloir changer de paradigme”. Cet appel à la mobilisation est lancé par Annie-Claude Thiolat, la présidente de l’association “ Place au vélo”,
A Nancy aussi, des associations interpellent leurs candidats. Sous forme d’un questionnaire en ligne, ils leurs demandent d’expliquer la place du vélo dans la cité, au coeur de leur programme.
La bicyclette s’immisce même depuis plusieurs semaines dans les débats à Montpellier, pourtant l’une des mauvaises élèves jusqu’ici des villes cyclables.
En France, la part du vélo dans les déplacements domicile-travail quotidien reste faible : 2,1 %, quand l’Allemagne pointe à 10% et les Pays-Bas arborent 29%. Si l'on compare les villes européennes, on va de 0,8% à Limoges, à 15% à Strasbourg, la ville pourtant la plus en pointe de France dans ce domaine. Loin, bien loin de la championne danoise Copenhague, avec 50 %.
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Planter des arbres : la promesse végétale
Végétaliser la ville est aussi devenu un argument clé dans cette campagne pour de nombreux candidats. A chacun sa méthode et sa communication qui passe souvent par le nombre d’arbres à planter.
Des cantines bio
Les cantines bio apparaissent aussi dans les programmes de nombreux candidats.En moyenne, en France, les produits bio représentent moins de 5% des achats de la restauration collective. A travers la loi dite "Egalim", cette part devra, en 2022 être d'au moins 20%. Il reste donc beaucoup à faire pour développer cette filière.
En Dordogne, un collège propose depuis la rentrée une restauration 100% bio, c'est le 1er en France.
En Limousin, si de nombreuses communes ont introduit des aliments bio dans leurs menus, leur part reste très minoritaire.
Une ascension des Verts dans les sondages
Cette année, les écologistes ont atteint un niveau très élevé dans les sondages. A l’approche des élections municipales, les leaders écologistes Nicolas Hulot et Yannick Jadot progressent . En février le baromètre réalisé par Ipsos-Public Affairs pour Le Point sur la popularité du personnel politiques indique une progression de Nicolas Hulot, qui reste la personnalité préférée des Français avec 51% de jugements favorables (+2 points) ; tendance similaire pour Yannick Jadot qui gagne 5 points pour atteindre 20%. Pour Daniel Boy, “cela ne tient pas seulement à la force des écologistes mais aussi à l'effondrement de la gauche, à la difficulté de la social-démocratie à retrouver des électeurs."
Beaucoup de socialistes ont transféré leurs votes vers les écologistes.
Les préoccupations vertes se traduiront-t-elles dans les urnes?
Globalement, selon le directeur de l’Ipsos, "comme les promesses environnementales ne sont plus le monopole des Écolos, qu’elles sont omniprésentes sur la plupart des programmes, les Français ont le sentiment que la différence des programmes se fera davantage sur les problématiques de la sécurité, la propreté, la circulation, ou le stationnement." Il n’est donc pas évident que les fortes préoccupations écologiques des français, se traduisent dans les urnes.
Notamment chez les jeunes. Car, poursuit Jean-françois Doridot, “ils sont traditionnellement abstentionnistes. Ils sont engagés dans des associations de protection de la nature, ou à vocation écologique. Pour autant,
ils ne sont pas convaincus que leur vote servira à quelque chose, qu’il se traduira au niveau politique.
Et ce sont les plus de 60 ans qui se déplacent le plus pour aller voter…"
Des villes qui vont peut-être basculer
Selon Jean-Christophe Doridot, et les sondages Ipsos/Sopra Steria, quatre grandes villes françaises pourraient basculer du côté des Verts.Rouen tout d’abord.La liste conduite par Jean-Michel Bérégovoy, soutenues par EELV, arriverait en tête avec 24% des intentions de vote des Rouennais (enquête, menée à Rouen pour France 3 Normandie et France Bleu Normandie du 28 février au 4 mars 2020).
Besançon ensuite, Lyon-ville, et peut-être Strasbourg.
Le directeur de l’institut de conclure : même s’il n’y a pas d’écolos dans toutes les équipes municipales, l’environnement prendra plus de place dans les politiques des communes à l’issue de ces élections.”