Toujours pas d'épilogue dans l'affaire du château de La Rochepot, décision reportée au 27 mai

Après un premier procès en 2022, un appel et des rebondissements, la justice se penchait à nouveau sur l'affaire du château de La Rochepot, en Côte-d'Or. Après trois jours d'audience, la décision a été mise en délibéré.

Pas de nouveau renvoi... Mais pas de décision rendue ce jour. Il faudra patienter encore deux mois, jusqu'au 27 mai, pour connaître l'avis de la justice sur le sort réservé aux propriétaires ukrainiens du château de La Rochepot, dans l'arrière-pays beaunois. 

Pas de nouveau renvoi

L'audience entamée lundi 25 mars s'est achevée ce mercredi 27 avec cette mise en délibéré. Les avocats des prévenus demandaient un renvoi en exigeant la révocation du président du tribunal Pascal Bridey, qui avait "fortement déconseillé de parler de la guerre de 2014" dans le Donbass à la prévenue Olga Kalina, l'une des trois mises en cause dans ce dossier. Les avocats estimaient que cette sortie constituait un pré-jugement de la prévenue. Mais cet argument n'a pas été retenu.

Au cours des trois jours de procès, la justice s'est à nouveau penchée sur ce dossier très dense, mettant en cause trois personnes : 

  • Dmitri Malinovsky, ukrainien, comparaissant notamment pour blanchiment,usage de faux, détention d'armes et travail dissimulé. Il était soupçonné de transactions douteuses liées à l'achat du château pour 3 millions d'euros, via une société luxembourgeoise, permettant une fraude à grande échelle en Ukraine. Il était absent car "souffrant" lors de ce procès en appel.
  • Olga Kiselova, ukrainienne, l'ex-maîtresse de Dmitri Malinovsky. 
  • Alexandru Arman, moldave, ancien chauffeur de Dmitri Malinovsky et gérant du château de La Rochepot à partir de 2016.

Ce 26 mars 2024, le parquet général a requis la confirmation des jugements prononcés en première instance : quatre ans et demi de prison dont six mois avec sursis contre Dmitry Malinosky, deux ans de prison avec sursis contre Olga Kalina, et six mois de prison dont quatre mois avec sursis contre Alexandru Arman.

L'édifice se dégrade, les habitants sont dépités

En attendant, le château de La Rochepot poursuit sa triste décrépitude. Construit au XIIe siècle, il était un joyau de la Bourgogne viticole et attirait 30 000 visiteurs par an lorsqu'il était encore ouvert aux touristes. Juché sur un éperon rocheux, il domine de son imposante silhouette le village de La Rochepot, dont les habitants se désolent chaque jour du sort réservé au bâtiment. Saisi par la justice en 2018, le château a été vidé de tous ses biens, dispersés aux enchères. Les habitants n'ont pu sauver qu'une Vierge à l'enfant, désormais installée en l'église de Nolay.

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En octobre 2023, plusieurs de ces habitants confiaient leur désarroi à France 3 Bourgogne : "Ça me désole de voir les portes fermées, des arbres et du lierre qui poussent sur les murs. C'est un crève-coeur", confiait un agriculteur. "Est-ce qu'il faudrait faire venir Stéphane Bern, ou un ministre, pour que l'histoire s'accélère, et qu'on retrouve un sentiment d'exister ?" s'interrogeait un conseiller municipal. 

Le délibéré du procès permettra-t-il d'entrevoir un avenir pour le château ? Rien n'est encore acté.

Le château de La Rochepot : un feuilleton de plus de 10 ans

2012 : château à vendre

En 2012, le château est mis en vente. Cet édifice avait été acheté en 1893 par Cécile Carnot, l'épouse du président de la République Marie-François Sadi Carnot. Elle l'avait offert à son fils, colonel, qui avait entrepris la vaste reconstruction du château alors en ruine. En 2012, ce joyau de la Bourgogne viticole se visite encore, et attire 30 000 visiteurs par an.

2014 : classé monument historique

En 2014, le château de La Rochepot est toujours en vente, mais obtient son classement au titre des monuments historiques, ce qui le protège davantage. Dans ce reportage tourné à l'époque par France 3, vous découvrez l'intérieur et le mobilier du majestueux édifice.

2016 : le rachat

En 2016, le château finit par trouver preneur pour environ 3 millions d'euros. À l'époque, l'identité exacte des acheteurs est floue : on les dit ukrainiens, lituaniens... Cependant, on sait que les propriétaires souhaitent laisser le lieu ouvert aux visiteurs, au plus grand soulagement des habitants de la commune. 

2017 : la nouvelle vie du château

Des événements sont organisés au sein du château, comme les Médiévales en 2017. Elles attirent 1500 visiteurs sur le week-end. L'occasion, là aussi, pour les amateurs de découvrir l'intérieur du bâtiment.

2018 : le choc

Le 5 octobre 2018, les gendarmes arrêtent le propriétaire du château, l'Ukrainien Dmitri Malinovsky, et saisissent plus de 4,6 millions d'euros de biens : le château, mais aussi une Rolls-Royce Phantom de collection, des oeuvres signées Salvador Dali...

L'opération est menée avec le soutien d'Europol. Trois complices suspectés, un homme et deux femmes, sont également arrêtés. Il s'avère que Dmitri Malinovsky était recherché en Ukraine, suspecté de nombreuses fraudes et de blanchiment d'argent. 

Les jours passant, on en apprend davantage sur le sulfureux châtelain ukrainien, qualifié de "fugitif de haut rang" par Europol. Il est suspecté d'avoir, en Ukraine, volé "plus de 12 millions d'euros appartenant à une compagnie privée" en février-mars 2015.

L'enquête démontre aussi que Dmitri Malinovsky s'était fait passer pour mort en Ukraine, échappant ainsi aux autorités de son pays. Mais les enquêteurs finissent par retrouver sa trace, après des investigations débutées en janvier 2018 autour de l'acquisition du château. Elles se penchent sur des transactions douteuses liées à l'achat du bâtiment, par une société luxembourgeoise derrière laquelle se trouve en réalité Dmitri Malinovsky. Les enquêteurs français et ceux d'Europol se rendent alors compte que l'Ukrainien est bien vivant, et mène la belle vie en Bourgogne.

Le mur du château de La Rochepot, octobre 2023
Le mur du château de La Rochepot, octobre 2023  © Tanguy Abalo / FTV

2021 : une douloureuse vente aux enchères

Les choses stagnent pendant trois ans, mais en octobre 2021, un nouveau coup dur s'abat sur les habitants de La Rochepot : ils apprennent que le mobilier du château va être mis en vente. Une pétition en ligne qui s'oppose à cette vente récolte plusieurs milliers de signatures. 

Les villageois expriment leur inquiétude.
Les villageois expriment leur inquiétude.  © Sylvain Bouillot / France Télévisions

Le maire de Beaune, Alain Suguenot, s'insurge lui aussi : "Il y a sûrement des dettes, mais on confond vitesse et précipitation. Quelle urgence y-a-t-il à vendre le mobilier du château ? Je sais qu’il y a une décision de justice, mais le préfet peut demander de repousser la vente de quelques semaines. Disperser le mobilier, c’est perdre 100 000 ou 200 000 euros sur la vente globale du château plus tard. C’est réaliser une moins-value", déplore le maire. 

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En dépit de ces protestations, la vente a bien lieu le 10 octobre 2021. Elle rapporte 450 000 euros, soit trois fois plus que prévu par les commissaires-priseurs. Parmi les lots très prisés : une statue de bouddha en bois doré, offerte par la dernière impératrice de Chine au président Sadi Carnot, vendue 52 000 euros. 

Le ministère de la Culture, lui, préempte plusieurs objets classés : des statues de plâtre, très fragiles, de l'artiste dijonnais Xavier Schanosky.

Lot de consolation pour les habitants : des paroissiens du village voisin de Nolay réussissent à se cotiser pour racheter une Vierge à l'enfant 5 000 euros. Cette statue est aujourd'hui toujours visible dans le village.

Début 2022 : toujours pas de procès 

Pendant ce temps, Dmitri Malinovsky reste emprisonné. Son procès doit avoir lieu à Nancy en février 2022, mais le jour prévu de l'ouverture, celui-ci est reporté. En effet, une requête en nullité est déposée par l'avocate d'Irina Malinovska, la mère du châtelain. Cela provoque le renvoi de l'intégralité du procès. Malinovsky et les six autres prévenus seront donc jugés ultérieurement, toujours à Nancy. Ce tribunal (la juridiction interrégionale spécialisée) est en effet compétent sur les affaires internationales aux multiples ramifications.

Pendant ce temps, sur place, France 3 constate que le château attire toujours des visiteurs, malgré sa fermeture.

Fin 2022 : le couperet tombe

Finalement, le procès a lieu mi-novembre 2022, et la justice rend sa décision le 8 décembre. Dmitri Malinovsky est reconnu coupable de blanchiment, usage de faux papiers d'identité, travail dissimulé et détention d'armes. Il est condamné à quatre ans et demi de prison, dont quatre ferme et six mois avec sursis, et 100 000 euros d'amende. Il est aussi interdit de séjour dans les quatre départements de Bourgogne. La justice prononce également la confiscation du château de La Rochepot.

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2023 : nouveau renvoi

Comme indiqué plus haut, le procès en appel de Dmitri Malinovsky et de six complices devait débuter ce 23 octobre. Mais, les avocats de l'une des prévenues ayant déposé une question prioritaire de constitutionnalité, le procès est reporté au 29 novembre 2023.... puis à nouveau reporté, en mars 2024.

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